L’inflation frappe aussi les Restos du Coeur. L’association créée par Coluche en 1985, qui distribue une aide alimentaire aux plus démunis, a annoncé qu’elle allait réduire le nombre de ses bénéficiaires l’hiver prochain faute de moyens. Environ 150.000 personnes ne pourraient plus y avoir accès.
« Aujourd’hui, nous ne sommes pas suffisamment solides pour absorber le flux de personnes qui ont besoin d’aide alimentaire », a regretté Patrice Douret, le président de l’association. « Si rien n’est fait, on pourrait devoir fermer d’ici trois ans », a-t-il alerté.
Dans la foulée, la ministre des Solidarités Aurore Bergé a promis 15 millions d’euros d’aides supplémentaires, ainsi qu’une enveloppe de 6 millions d’euros pour les associations venant en aide aux jeunes enfants par la distribution de couches et de nourriture infantile. La ministre a lancé un « appel solennel aux grandes entreprises » pour « l’aide aux plus fragiles ».
Cependant, le porte-parole des Restos du Coeur Yves Mérillon a déclaré lundi matin sur franceinfo que « sur ces 15 millions il y a en avait déjà 10 qui étaient dans les tuyaux, donc la vraie augmentation c’est 5 millions. […] Mais il faudra beaucoup plus ». « Ce qu’il faut c’est enrayer toute cette pauvreté qui augmente », a-t-il insisté.
Avant l’annonce d’Aurore Bergé, des industriels avaient déjà répondu à l’appel au secours de l’association. Le Groupement Les Mousquetaires, qui exploite les magasins Intermarché et Netto, a annoncé la mise en place d’opérations de collectes spéciales en concertation avec les Restos du Coeur d’ici la fin de l’année. Le groupe a aussi promis « des dons significatifs issus des 56 unités de production » dans un communiqué.
L’enseigne Carrefour, partenaire des Restos du Coeur depuis 16 ans, « va répondre à l’appel », a annoncé son PDG Alexandre Bompard sur BFM TV, par une aide financière ou des dons et collectes.
De plus en plus de bénéficiaires
Les Restos du Coeur sont débordés en raison de la « hausse très importante » du nombre de personnes ayant recours aujourd’hui à une aide alimentaire. Ils sont aussi confrontés à une « augmentation des coûts de fonctionnement » liée à l’inflation.
Patrice Douret a lancé « un appel aux forces politiques et économiques de notre pays » pour le « lancement d’un plan d’urgence alimentaire » au micro de TF1. L’association a déjà accueilli 1,3 million de personnes en 2023, contre 1,1 million sur l’ensemble de l’année 2022. Et ces derniers mois, son budget pour les achats alimentaires, redistribués ensuite gratuitement aux bénéficiaires, a doublé.
« C’est un véritable crève-coeur, mais nous allons devoir massivement dire non à des personnes que nous aurions pu accueillir avant l’inflation, et nous allons devoir réduire la quantité de ce que nous donnerons aux personnes qui rentreront dans nos critères », a déploré le président de l’association.
En clair, le montant de reste à vivre pour être admissible aux Restos du Coeur va être abaissé. Mais malgré cette mesure, l’association a besoin de 35 millions d’euros supplémentaires pour terminer l’exercice à l’équilibre.
« Pas assez entendus »
Elle s’attend à servir 170 millions de repas cette année, contre 140 millions l’année dernière. Son directeur a aussi fait part de sa colère, expliquant demander de l’aide au gouvernement depuis des mois. « On n’a pas assez été entendus », a-t-il souligné. Les Restos du Coeur assurent en France 35 % de l’aide alimentaire, avec un budget de 200 millions d’euros par an issus de dons de particuliers, d’entreprises et d’aides publiques.
Les oppositions de gauche comme de droite ont relayé ces propos. Mathilde Panot, la cheffe de file des députés LFI, a annoncé sur X (anciennement Twitter) que son parti déposerait « un plan d’urgence alimentaire » dans les prochains jours.
Du côté des Républicains, le président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a promis, sur le même réseau social, que la région serait « au rendez-vous de l’appel des Restos du Coeur », réclamant, lui aussi, un plan d’urgence alimentaire. Le vice-président de l’Assemblée Sébastien Chenu (Rassemblement National) a, quant à lui, réagi en incriminant « ceux qui nous gouvernent depuis si longtemps ».
Avec AFP