Du jamais vu depuis presque 30 ans. En 2023, les hausses de salaire sont attendues à 4,5% en moyenne en 2023, d’après une enquête publiée par le cabinet de recrutement PageGroup. Entre 1996 et 2018, selon l’Insee, les salaires n’avaient augmenté que de 0,6% en moyenne par an entre 1996 et 2018 selon l’Insee.
Une étude du cabinet de ressources humaines LHH publiée fin août indiquait, elle, que la moitié des salariés en France connaîtront en 2023 une augmentation supérieure à 4,7% et que 93% des entreprises « ont prévu des mesures salariales » cette année. Elles viennent compenser une hausse des prix à la consommation attendue à 5% en moyenne pour l’ensemble de 2023, après 5,2% en 2022, toujours selon l’Insee.
« Avant, on avait une inflation d’énergie, maintenant on a une inflation de supermarché », relève Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH), qui pointe « un peu plus de fébrilité chez les dirigeants parce que l’inflation continue ».
Et comme l’an dernier les prix avaient progressé nettement plus vite que les salaires, « sur deux ans, on n’a pas rattrapé pour la population moyenne le niveau de l’inflation », explique à l’AFP Laurent Blanchard, directeur général de PageGroup France. Le directeur du département analyses et prévisions de l’OFCE, Eric Heyer, estime le décrochage des salaires par rapport aux prix à deux points de pourcentage. Pour cet économiste, les employeurs ont aujourd’hui « des marges pour augmenter les salaires sans avoir à les répercuter sur les prix » et provoquer une spirale inflationniste.
Face à l’inflation, les hausses de rémunération ont plus souvent que par le passé pris la forme d’augmentations générales et des « mesures salariales complémentaires » ont été prises par 60% des entreprises, relève LHH. Parmi elles, la prime de partage de la valeur a été versée par 45% des entreprises pour un montant médian déclaré de 775 euros, précise ce cabinet. Les augmentations générales des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise (OETAM), qui ont pour certains bénéficié des hausses du Smic intervenues au 1er janvier et au 1er mai 2023, sont supérieures à 4,6% dans la moitié des cas, contre 4% pour les cadres, selon le cabinet Deloitte. En tenant compte des dispositifs de rémunération variable et de l’épargne salariale, les augmentations médianes sont de 7,0% et 3,0% respectivement pour les salariés non-cadres et les cadres.
2024 pourrait sonner le début de la fin des augmentations
Le pouvoir de négociation reste toutefois très inégal selon les salariés. PageGroup relève ainsi que 40% d’entre eux « ont le sentiment de ne pas avoir eu leur salaire revalorisé au cours des deux dernières années ». Et selon une enquête réalisée par le cabinet Robert Half, « 45% des femmes et 48% des 45-65 ans déclarent n’avoir perçu aucune augmentation au cours des douze derniers mois » contre seulement 35% des hommes en général et 30% des 18-34 ans.
Alors que débutent les négociations annuelles dans les entreprises sur les hausses de salaire pour 2024, le ralentissement conjoncturel pourrait limiter les augmentations à venir. « Qui dit ‘ralentissement marqué’ dit « destruction d’emplois et augmentation du chômage », auquel cas le rapport de force changerait « défaveur des salariés », note Eric Heyer. « Le nombre de créations d’emploi est un peu moins dynamique depuis trois, quatre mois », constate de son côté Laurent Blanchard, de PageGroup. Le directeur de cabinet de recrutement ajoute toutefois que le taux de chômage, supérieur à 7% pour l’ensemble de la population, « est plutôt à 4% », dans les métiers qualifiés, pour lesquels les entreprises sont prêtes à accorder des augmentations importantes afin de fidéliser des salariés. Une tendance qui devrait selon lui perdurer.
Un geste fiscal du gouvernement pour les salariés augmentés
Par ailleurs, le gouvernement a confirmé mardi que le barème de l’impôt sur le revenu serait rehaussé de 4,8%, évitant à plus de 300.000 salariés augmentés d’entrer dans le champ de cet impôt. Selon les tranches actuellement en vigueur, les revenus des Français peuvent être taxés à 0% (s’ils sont inférieurs à 10.777 euros annuels), 11% (entre 10.778 et 27.478 euros de revenus annuels), 30% (entre 27.479 et 78.570 euros), 41% (entre 78.571 et 168.994 euros) ou 45% (au-dessus de 168.994 euros).
Aux Etats-Unis, l’inflation a fait chuter les revenus réels de 2,3%
L’inflation a fait chuter les revenus réels de 2,3% aux États-Unis en 2022, malgré une flambée des salaires). « Une inflation historiquement élevée a entraîné une baisse du revenu réel médian des ménages », a détaillé Liana Fox, une responsable du Census bureau, qui a dévoilé ces données. Celui-ci s’est établi à 47.960 dollars. Selon une autre mesure, le taux de pauvreté a augmenté pour la première fois depuis 2010, grimpant de 7,8% à 12,4% entre 2021 et 2022. Celui des enfants a même plus que doublé, grimpant à 12,4%, quand il était en 2021 de 5,2%, son plus bas historique.
(Avec AFP)