C’était une note particulièrement attendue, étant donné le contexte des finances publiques françaises. L’agence de notation Moody’s a maintenu la note de la dette française inchangée, à « Aa2 », alors que certains s’inquiétaient d’une potentielle dégradation. Cette décision « témoigne de la crédibilité » du pays, s’est félicité le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire.
En outre, la note « Aa2 » est une des meilleurs possibles. Elle indique des perspectives solides et stables pour l’économie tricolore. Cette note « conforte notre volonté de poursuivre le désendettement de la France et de respecter la trajectoire définie par le président de la République, et matérialisée par la loi de programmation des finances publiques », a commenté Bruno Le Maire.
Au même moment, le gouvernement d’Elisabeth Borne échappait à deux motions de censure, du RN et de LFI, à l’Assemblée nationale, après avoir fait passer aux forceps le volet « recettes » du budget 2024 par 49.3. Cette partie du texte a de facto été votée et a été transmise dans la foulée au Sénat.
Intérêts de plus en plus élevés
Le texte du budget 2024 prévoit un total de dépenses de l’Etat de 491 milliards d’euros, hors charge de la dette, et un déficit public à 4,9 % du PIB cette année, puis 4,4 % en 2024, largement hors des critères européens de Maastricht.
Pour redresser les comptes publics dès 2024, le gouvernement a exclu des augmentations d’impôts et mise plutôt sur la croissance, avec une prévision de 1,4 % jugée « élevée » par le Haut conseil des finances publiques, et sur la fin de mesures exceptionnelles de soutien aux ménages et entreprises. La dette a dépassé les 3.000 milliards d’euros au premier trimestre 2023 et la France prévoit d’emprunter un montant record de 285 milliards d’euros sur les marchés en 2024.
Et du côté du financement des dépenses, la situation de l’Hexagone s’est nettement dégradée ces dernières années. Depuis quelques mois, les taux d’intérêt auxquels la France se finance sur les marchés n’ont cessé d’augmenter, et ont même connu un nouvel accès de fièvre ces dernières semaines pour dépasser le seuil de 3,5 %. C’est plus que le taux de 3,4 % sur lequel tablait Bercy à la fin de l’année.
Certes, tous les pays de la zone euro sont plus ou moins concernés par ce virage brutal avec la décennie précédente marquée par l’argent facile et les taux très bas. Mais plus inquiétant pour la France, le spread – la différence de taux avec l’Allemagne, qui sert de juge de paix pour la stabilité du financement français – s’est sensiblement dégradé récemment et atteint désormais 60 points de base.
Perspectives de croissance optimistes
Si Moody’s a gardé la note française inchangée, l’agence Fitch va rendre son avis le 27 octobre, et Standard & Poor’s le 1er décembre. En avril dernier, Fitch avait abaissé la note de crédit de la France d’un cran à « AA- », assortie d’une perspective « stable ». Un coup de semonce pour les finances tricolores. L’agence avait souligné « des déficits budgétaires importants et des progrès modestes » pour réduire les dépenses.
Le ralentissement de la croissance pourrait avoir un effet défavorable sur les recettes budgétaires, et la charge de la dette dans les dépenses pourrait s’accroître avec une nouvelle augmentation des taux de la Banque centrale européenne (BCE) lors de sa réunion du 26 octobre.
Le budget 2024 sera-t-il suffisant pour apaiser les tensions naissantes sur les marchés ? En réalité, la prévision de baisse du déficit s’explique avant tout par la fin des dépenses engagées pour le bouclier énergétique, sans effort structurel sur la dépense publique. Bercy a promis d’être plus exigeant l’an prochain, avec 12 milliards d’économies annoncées. Mais sentant que cela ne suffirait peut-être pas aux yeux des marchés, Bruno Le Maire a demandé à sa majorité de trouver dès maintenant un milliard d’euros d’économies supplémentaires pour le budget 2023. Façon de montrer sa détermination. Pour l’instant, seuls 500 millions ont été trouvés, mais rien qui ne relève d’une économie structurelle.
Avec AFP