Comme je le souligne régulièrement : les crises sont toujours des phases d’opportunité. Il ne sert donc à rien de céder au pessimisme. Il est, au contraire, indispensable de garder l’espoir et de développer en permanence un comportement et des stratégies «anti-crises». En revanche, tomber dans le déni de réalité et l’optimisme béat serait complètement erroné, voire dangereux. En effet, si l’optimisme est une nécessité, le réalisme en est une autre encore plus déterminante. Pourtant, bien loin de ce devoir de transparence et de pragmatisme, certains voudraient encore nous faire croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, en particulier dans l’Hexagone. Bien entendu, nous aimerions toutes et tous en dire autant. Seulement voilà, il ne sert à rien de masquer la réalité. Non seulement parce que les Français ne sont pas dupes, mais aussi parce que les déceptions passées et à venir pourraient bien mettre à mal la stabilité sociétale de notre «douce France». Et ce d’autant que le chômage français vient de repartir en forte hausse au troisième trimestre 2023.
L’économie française s’est endormie sur ses lauriers. Et l’emploi se dégrade…
Aussi, comme je l’ai toujours fait depuis plus de vingt-cinq ans et également depuis plus de trois ans sur ma chaîne YouTube (qui compte désormais plus de 111 000 abonnés, j’en profite d’ailleurs pour les remercier de leur fidélité), je continuerai de dire la vérité «quoi qu’il en coûte». Voici donc la réalité de l’économie française, en termes de croissance, de chômage et de dette publique. Attention, il ne s’agit pas de faire du «french bashing». Bien au contraire. D’ailleurs, la France est certainement l’un des plus beaux pays du monde et l’un de celui où l’on vit le mieux. Du moins pour le moment.
La France c’est effectivement 68 millions d’habitants, un PIB de 2 760 milliards d’euros en 2023 (soit encore la septième puissance économique mondiale). Elle bénéficie également d’un positionnement géostratégique exceptionnel, d’infrastructures routières, maritimes et aéroportuaires de haut-rang. Sans oublier ses paysages, ses villages et ses villes magnifiques que le monde nous envie. En France, l’espérance de vie est aussi de 85 ans pour une femme et 80 ans pour un homme, contre environ 65 ans dans les années 1950-60.
La France c’est aussi le numéro un mondial des dépenses sociales : 31,6% du PIB, contre 21,2% pour la moyenne de l’OCDE. Il s’agit là d’une redistribution sans équivalent qui permet notamment de faire baisser le taux de pauvreté de 22% à 14,5%, soit environ 5 millions de personnes sauvées de la pauvreté. Enfin, la France c’est également des fleurons mondiaux dans de nombreux secteurs : aéronautique, automobile, construction, énergie, chantiers navals, industries agro-alimentaires, luxe, pharmacie, construction, tourisme…
Pour autant, en dépit ou peut-être à cause de ces points forts, la France s’est endormie sur ses lauriers depuis 40 ans. A tel point que sa croissance annuelle structurelle est passée de 2,5% dans les années 1980 à environ 0,9% depuis une quinzaine d’années. Dans ce cadre, en termes de PIB par habitant, la France a chuté de la onzième place mondiale en 1990 à la 24ème place depuis 2019, donc avant même la pandémie, qui n’a évidemment pas arrangé les choses, tout comme la flambée inflationniste de 2021-2023.
Le taux de chômage en France a progressé au troisième trimestre, avant même le retour de la récession
En effet, la situation actuelle et celle à venir sont très loin d’être aussi roses que certains voudraient nous laisser croire. Et pour cause : en dépit d’une flambée de la dette publique de près de 700 milliards d’euros depuis 2020, le PIB français en valeur (c’est-à-dire augmenté de l’inflation) n’a progressé que de 286 milliards d’euros. Encore plus inquiétant, au regard des derniers indicateurs avancés de la conjoncture française (indices des directeurs d’achat mais aussi du climat des affaires et de la confiance des ménages de l’INSEE), il devrait même baisser au quatrième trimestre 2023. De plus, avant même le retour de la récession, le taux de chômage français mesuré par l’INSEE a déjà augmenté de 0,2 point au troisième trimestre 2023, atteignant 7,4 %, un plus haut depuis le deuxième trimestre 2022.
Le taux de chômage pourrait rapidement grimper vers 8%, au vu de l’indice Insee du climat de l’emploi
Cette augmentation (la plus forte depuis 2020) est d’autant plus inquiétante que le chômage est normalement une variable retardée de l’activité. Cela signifie qu’habituellement, le chômage augmente six mois après l’avènement de la récession. Or, selon les chiffres de l’INSEE, celle-ci n’a pas encore commencé. De quoi imaginer ce qui attend le chômage français avec la baisse du PIB qui se dessine pour le quatrième trimestre 2023 et le premier trimestre 2024. L’indice INSEE du climat de l’emploi montre d’ailleurs que le taux de chômage pourrait rapidement remonter vers les 8%.
En outre, soulignons qu’il ne s’agit là que du chômage de catégorie A. Si l’on observe le taux de chômage toutes catégories, également appelé taux de sous-emploi, la sanction est bien plus grave. Celui-ci, qui comptabilise donc tous les chômeurs (ceux de la catégorie A + le halo du chômage, c’est-à-dire les chômeurs qui ne sont pas comptabilisés parce qu’ils ne recherchent pas d’emploi activement ou ne sont pas disponibles + le chômage partiel), est de 16,9%, soit plus de 5,5 millions de personnes et un plus haut depuis le quatrième trimestre 2021. Quant au taux de chômage des moins de 25 ans, il remonte à 17,6%, au plus haut depuis l’été 2022.