Faire le dos rond en espérant que l’éclaircie attendue se confirme. Pour le gouvernement, les nouvelles prévisions économiques de la Banque de France dévoilées laissent présager quelques maux de tête dans les mois à venir : la dynamique de la croissance devrait rester entravée l’an prochain , loin de l’accélération nécessaire pour atteindre les objectifs budgétaires.
Mais Bercy pourra se consoler avec la confirmation d’un repli de l’inflation qui devrait soulager le pouvoir d’achat, ce qui n’est jamais négligeable politiquement.
Problème pour le gouvernement
La Banque de France s’attend désormais à une croissance de 0,8 % cette année et non plus de 0,9 % comme en septembre. Et l’activité ne devrait progresser que de 0,9 % l’an prochain. « C’est un ralentissement incontestable, mais ce n’est pas la récession que l’on craignait il y a un an » après les successions de crises (Covid, Ukraine, inflation, etc.), a souligné sur France Inter François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France.
C’est certes mieux que si ça avait été pire, mais cela ne fait clairement pas les affaires du gouvernement. Celui-ci table en effet sur une croissance de 1,4 % l’année prochaine pour ramener le déficit public de 4,9 % du PIB en 2023 à 4,4 % en 2024.
Si cette croissance anémiée devait se confirmer, Bercy devra nécessairement trouver des économies supplémentaires pour arriver à bon port budgétaire, alors que l’examen du projet de loi de finances 2024 a plutôt alourdi la barque de la dépense publique. A ce stade, la Banque de France juge toutefois que cette moindre croissance ne met pas encore en danger la trajectoire de finances publiques de l’exécutif pour 2023 et 2024.
François Villeroy de Galhau préfère de toute manière passer un message positif, jugeant que « le brouillard commence à se dissiper un peu ». La croissance est censée se dynamiser dès 2025, à +1,3 % puis +1,6 % en 2026. Cela s’expliquerait notamment par le reflux de l’inflation, désormais bien entamé. « Il y a une bonne nouvelle, c’est que les choses vont dans le bon sens pour l’inflation qui était la préoccupation numéro un des Français et qui va se résorber », a assuré le gouverneur de la Banque de France.
Gains de pouvoir d’achat
Celui-ci assume « un engagement » : « nous allons ramener l’inflation à 2 % d’ici à 2025 au plus tard », a-t-il avancé. Le taux était de 7 % début 2023 et devrait s’établir en moyenne à +3,5 % sur l’année, avant de refluer à 2,5 % en moyenne l’an prochain. Après la fin de la flambée des prix de l’énergie, ce sont les prix alimentaires et manufacturés qui devraient prendre le relais en 2024 pour alimenter le phénomène, avant que les prix des services achèvent la tendance en 2025.
Cette perspective a de quoi soulager Bercy, d’autant que le ralentissement de la hausse des prix sera plus prononcé que celui des salaires nominaux. En clair, les salaires réels devraient recommencer à croître sur la période 2024-2026 après une période noire entre 2021 et 2023.
« C’est une bonne nouvelle pour le pouvoir d’achat », insiste François Villeroy de Galhau. La consommation des Français est ainsi censée redémarrer l’an prochain (+1,5 % après +0,7 % en 2023), ce qui va alimenter la croissance. D’autant que le taux d’épargne devrait se réduire, même s’il resterait à un niveau supérieur à celui d’avant le Covid.
Chômage en hausse
L’investissement privé prendrait ensuite le relais en 2025 pour tirer vers le haut l’activité économique, une fois que les effets du desserrement de la politique monétaire se seront fait sentir. La BCE doit en effet commencer à réduire ses taux d’intérêt l’an prochain. Mais le gouverneur de la Banque de France a mis en garde contre toute tentative de hâter ce mouvement. « Si l’on baisse les taux trop tôt, on risque une rechute sur l’inflation », a-t-il prévenu.
Dernier caillou dans la chaussure du gouvernement, cette économie qui sort lentement des périodes de crises devrait éloigner l’objectif affiché de plein-emploi. Le taux de chômage est attendu à 7,8 % en 2025, alors qu’il avait atteint 7,2 % fin 2022. Une nouvelle baisse n’est pas attendue avant 2026 (7,6 %).
« Gardons le cap du plein-emploi. Ce ne sera pas pour tout de suite avec le ralentissement économique, mais c’est une perspective réaliste sur la décennie », a estimé François Villeroy de Galhau.