Plus de 2 milliards d’euros chaque jour. C’est ce que perd l’économie française quotidiennement durant le confinement pour endiguer l’épidémie de coronavirus , selon les économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) . Jusqu’au 11 mai prochain, environ 60 % de cette somme sera compensée par la puissance publique via les reports de charges, le chômage partiel, les prêts garantis par l’Etat ou encore les aides versées aux indépendants.
Mais, selon les économistes de l’OFCE, cette baisse du revenu national d’environ 120 milliards d’euros sur les huit semaines de confinement est supportée à 35 % par les entreprises, soit environ 42 milliards d’euros. Comme les entreprises investissent moins pendant cette période, elles ne devraient perdre en deux mois « que » 19 milliards.
Les entreprises très touchées
Cette perte reste toutefois énorme et il leur sera difficile de l’absorber seule. Cela « pose la question du rebond après l’épisode de confinement. Le risque est grand de voir s’enclencher alors une spirale récessive : faillites et réduction de l’emploi conduiront à une réduction du revenu des ménages qui alimentera la réduction de l’activité », écrivent les économistes dans une note.
« La préservation du tissu productif sera centrale dans l’après-crise », fait valoir Xavier Ragot, président de l’OFCE. Mais que faire alors que les fonds publics risquent fort de se raréfier ? « Les annulations de charges ne devront pas se limiter aux seuls secteurs concernés par la fermeture administrative. Il va falloir élargir le spectre, mais une annulation générale serait coûteuse et inefficace, prévient Xavier Timbeau, économiste à l’OFCE. Les annulations pourraient, par exemple, être conditionnées à une perte de chiffre d’affaires », propose-t-il.
Parallèlement, il émet l’idée que l’Etat indemnise les entreprises pour leurs pertes correspondant à la part non utilisée de leur capital pendant le temps du confinement. Un restaurant qui n’utilise pas ses locaux ou alors une entreprise qui n’a pas fait tourner ses machines pendant plusieurs semaines seraient concernés. Le dispositif pourrait fonctionner comme le chômage partiel des salariés . Sur la base d’une déclaration attestant la non-utilisation de ce capital pendant une durée précise, l’entreprise pourrait toucher une somme de l’Etat en fonction du coût global du capital. Cette somme pourrait prendre la forme d’un crédit d’impôt.
La question de l’épargne de précaution
L’autre objet de l’attention des économistes, c’est la demande. Pendant les huit semaines prévues de confinement, la plupart des ménages continuent de toucher des revenus. Les Français accumuleraient 55 milliards d’euros d’épargne, « forcée » puisque les consommateurs, enfermés chez eux, ne peuvent dépenser autant que d’habitude. Le Trésor l’estime même à 100 milliards d’euros d’ici à septembre. « Si la consommation reste atone, alors la récession sera profonde. Si elle se reprend vite, la crise sera amoindrie d’autant », estime Xavier Ragot.
La crainte que les Français constituent une épargne de précaution se renforce
Il y a de fortes chances pour que les ménages préfèrent ne pas toutconsommer , en raison de craintes sanitaires et économiques. D’autant que le confinement pourrait mettre au chômage 400.000 personnes de plus, selon l’OFCE. Et si, malgré les aides aux ménages les plus touchés, la consommation ne repart pas, « alors la question d’une taxe sur l’épargne se posera », estime Mathieu Plane, économiste à l’OFCE. D’ailleurs, la semaine dernière, les députés PS ont proposé « un prélèvement exceptionnel de solidarité sur les encours d’assurance-vie supérieurs à 30.000 euros ».