Après le « Ségur de la santé » , le gouvernement doit-il se préparer à un « Bercy de la fonction publique » ? Le lancement ce lundi au ministère de la Santé, avenue de Ségur, de la négociation sur la rémunération des soignants donne en tout cas des idées aux syndicats de fonctionnaires. Olivier Dussopt, le secrétaire d’Etat en charge de la Fonction publique, a prévu de les réunir la première semaine de juillet à Bercy pour le traditionnel « rendez-vous salarial », et ceux-ci poussent déjà pour que l’effort gouvernemental ne soit pas limité au seul domaine hospitalier.
« On est arrivé au bout d’un système qui aboutit à une forme de déclassement des métiers de la fonction publique. C’est l’occasion de tout remettre à plat », estime Luc Farré, secrétaire général de l’Unsa Fonction publique. Pour Mylène Jacquot, la secrétaire générale de CFDT Fonction publique, le « problème d’attractivité pour les métiers d’infirmiers ou d’infirmières se retrouve dans d’autres secteurs, comme en témoigne le nombre de candidats en baisse à beaucoup de concours ». Selon le dernier rapport général de la fonction publique, la sélectivité des concours (le rapport entre le nombre de candidats et le nombre d’admis) a atteint en 2017 son point le plus bas depuis 2001.
Les enseignants pas oubliés
Les syndicats de fonctionnaires n’ont par ailleurs pas oublié la revalorisation du salaire des enseignants qui avait été promise dans ce cadre de la réforme des retraites, même si celle-ci est désormais sur une voie de garage. « Le gouvernement admet que les soignants sont moins bien payés que dans les autres pays européens, mais c’est la même chose pour les enseignants », fait valoir Luc Farré. « Pompiers, éboueurs, agents de l’administration fiscale ou des douanes et bien d’autres, ils sont nombreux à avoir été en première ligne et à mériter une reconnaissance », renchérit Jean-Marc Canon, secrétaire général de la CGT Fonction publique. Cette dernière vient d’écrire avec quatre autres organisations (FO, FSU, Solidaires et FAFP) à Olivier Dussopt pour réclamer le dégel du point d’indice.
A Bercy, on fait valoir que la négociation en cours ne concerne que les seuls personnels soignants. De fait, celle-ci pourrait déjà se révéler très coûteuse pour les finances publiques, jusqu’à 3,5 à 4 milliards d’euros selon les calculs faits par le cabinet Roland Berger . A côté de cela, l’exécutif doit également tenir compte des derniers effets des accords catégoriels décidés en 2016 (accords PPCR) sur la masse salariale publique, avec un coût supplémentaire d’environ 700 millions en 2020 et de moins de 600 millions l’an prochain.
Point d’indice différencié
Pour revaloriser les soignants, l’exécutif étudie notamment, selon nos informations, la possibilité d’une gestion différenciée du point d’indice selon les fonctions publiques (Etat, collectivités locales ou hôpital). Une remise au goût du jour d’une idée déjà lancée en 2017, à l’époque pour assouplir la gestion des collectivités territoriales , mais qui avait été abandonnée. « Nous n’y sommes pas favorables, c’est un frein à la mobilité », prévient Mylène Jacquot (CFDT). Celle-ci insiste pour que les soignants des fonctions publiques d’Etat (infirmières scolaires) ou des collectivités territoriales (certains Ehpad) soient traités sur un pied d’égalité par rapport au personnel des hôpitaux.