Le 19 août, le ministre de la Santé Olivier Véran a écrit au nouveau directeur de l’Assurance-maladie, Thomas Fatome, pour lui demander d’ouvrir plusieurs négociations conventionnelles avec les professionnels de santé« dès la fin de l’été ». Cette lettre de cadrage, qui a également été communiquée aux syndicats, suscite déjà des remous chez les médecins. L’enjeu pour ces derniers, c’est d’obtenir une revalorisation de l’acte individuel (la dernière date d’ il y a quatre ans ), alors que les pouvoirs publics promeuvent des rémunérations collectives ou forfaitaires.
Le rôle pivot des communautés territoriales
La première négociation, interprofessionnelle, vise à accélérer la structuration des libéraux en « communautés professionnelles territoriales de santé » (CPTS) . Il y a deux ans, Emmanuel Macron a formulé le voeu que l’exercice isolé devienne l’exception en 2022. Un premier accord interprofessionnel a permis de pérenniser les ressources de ces structures libérales. Il s’agit à présent, entre autres, de financer la préparation aux « menaces et crises sanitaires graves » et la prise en charge des « urgences sanitaires ».
Le gouvernement veut également soutenir financièrement les efforts de coordination entre soignants sur le terrain. Mais avec deux exigences : « conforter le rôle pivot des CPTS », « et ne pas aboutir à la mise en place d’une rémunération individuelle pour des coopérations qui ne seraient pas structurées à l’échelle d’une patientèle ».
Le syndicat SML s’élève contre cette « nouvelle étape d’étatisation par les territoires », qui « ne finance que les structures au détriment des actes et des soins médicaux ». « Notre priorité, c’est bien le paiement à l’acte. Nous voulons une revalorisation comme les médecins hospitaliers avec le Ségur », insiste Jean-Paul Ortiz, le président du syndicat CSMF, en soulignant que les cabinets doivent supporter des coûts supplémentaires depuis le coronavirus : plexiglas, masques, chiffons stérilisants, etc.
Un financement au résultat
La deuxième négociation ne concerne que les médecins. Ils vont devoir organiser avec l’Assurance-maladie la prise en charge des soins non programmés en ville , qui sont le talon d’Achille du système de santé. Leur implication (maisons médicales de garde par exemple, pour soulager les urgences hospitalières) sera valorisée, promet Olivier Véran. Toutefois, cela « ne devra pas passer par une évolution généralisée de la rémunération à l’acte directe ». « Je souhaite que soient trouvées des solutions de financement au résultat », en tenant compte à la fois du service effectivement rendu et des organisations de permanence des soins mises en place, ajoute le ministre.
« Cette posture révèle le projet profond du gouvernement de faire glisser la médecine libérale dans un système étatique et de capitation », mord le SML, qui ne veut pas plus de 20 % de tarification au forfait pour les médecins. « L’augmentation des soins non programmés devra passer par une augmentation de la rémunération à l’acte, en privilégiant la revalorisation des consultations », met en garde Jean-Paul Ortiz.
Le ministère indique par ailleurs qu’il veut bien revaloriser la consultation pour certaines spécialités qui facturent peu d’actes techniques, gynécologues, pédiatres ou psychiatres, mais à part cela, il compte développer une « rémunération des spécialistes assise sur la qualité de leur pratique ».
Chez MG France, qui représente les généralistes, aux rémunérations déjà très diversifiées, le président Jacques Battistoni est d’accord avec les orientations de la lettre de cadrage, « si la visite à domicile, priorité numéro un, est revalorisée substantiellement ».