C’est moins pire que si ça avait été franchement plus mauvais. Le projet de loi de Finances rectificatif (PLFR) pour 2020 présenté ce mercredi en Conseil des ministres – le quatrième du genre depuis le début de la crise sanitaire en mars – va acter une nouvelle dégradation du déficit , dépassant une fois de plus tous les records du genre : celui-ci est désormais attendu à la fin de l’année à 11,3 % du PIB pour tenir compte des effets du nouveau confinement, alors que Bercy espérait encore le contenir à 10,2 % en septembre dernier.
Mais le gadin aurait pu être plus fort encore sans la bonne surprise des recettes fiscales, qui pourraient cette année être finalement supérieures de 2,4 milliards d’euros à ce que prévoyait l’exécutif en septembre, et ce malgré le ressac économique provoqué par le tour de vis sanitaire de ces dernières semaines.
Comment comprendre cette relative bonne fortune fiscale, alors que la récession sera finalement amplifiée (à -11 %) par le reconfinement décidé par Emmanuel Macron ? Pour cela, il faut se replonger deux mois en arrière, qui paraissent aujourd’hui une éternité. Début septembre, Bercy avait constaté une forte reprise économique depuis la sortie du premier confinement. Mais personne n’avait anticipé que ce rebond serait du niveau de celui finalement annoncé la semaine dernière par l’Insee pour le troisième trimestre (+18 %). De quoi remplir les caisses de l’Etat, malgré la rechute attendue à la fin de l’année.
Bonnes surprises
Ainsi les recettes de l’impôt sur le revenu pourraient être supérieures de 600 millions par rapport aux prévisions de septembre, celles de l’impôt sur les sociétés de 2,8 milliards et celles de la TVA de 700 millions. Seule mauvaise surprise, la TICPE (taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques) voit son niveau attendu refluer de 1,4 milliard. « Ce qui s’est passé après le premier déconfinement est un message d’espoir dans notre capacité à redresser les finances publiques. Les impôts rentreront bien et spontanément dès lors que la croissance reviendra », veut-on croire à Bercy. Pour relativiser ce léger mieux, il faut quand même ajouter que les recettes fiscales auront malgré tout été grevées de 100 milliards (!) en 2020 par rapport à ce qui était attendu avant la crise sanitaire.
Ce petit matelas de rentrées d’impôt est néanmoins bienvenu, alors que le gouvernement est une nouvelle fois obligé de sortir le carnet de chèques pour faire face à la crise. Le quatrième PLFR prévoit en effet 20 milliards d’euros de dépenses supplémentaires pour tenir compte des effets du nouveau confinement. Sur ce total, 1,9 milliard d’euros sera mobilisé pour financer un surcroît de dépenses de santé, et 1,1 milliard sera dédié à la prime pour les personnes précaires voulue par l’exécutif.
Confinement de deux mois
Le reste sera dévolu aux aides aux entreprises , avec des crédits renforcés en préventif pour tenir un confinement de deux mois. « Ce PLFR est placé sous le signe du soutien aux entreprises, et notamment aux commerces à travers l’effort très important fait pour le fonds de solidarité » pour les PME et les indépendants, assure-t-on à Bercy. Ainsi les crédits de ce fonds de solidarité vont être réabondés de 10,9 milliards, tandis que 3,2 milliards seront ajoutés au budget de l’activité partielle et 3 milliards aux exonérations de charges.
La facture aurait pu être plus salée encore, puisque les aides aux entreprises représentent un budget de 15 milliards par mois de confinement. Heureusement, environ 10 milliards déjà provisionnés, mais pas dépensés pour l’activité partielle et le fonds de solidarité, serviront à payer une partie de la facture.
Au total, avec ces nouveaux crédits, le niveau de la dépense publique sera encore supérieur à ce qui était prévu, s’établissant au niveau jamais vu en temps de paix de 64,3 % du PIB, contre 62,5 % prévus en septembre et 53,7 % en 2019. Soit un envol supérieur à dix points de PIB sur un an.