Une fois la crise passée, le gouvernement se donne cinq ans pour rétablir les finances publiques, et prévient d’ores et déjà que cela passera par des “efforts importants” sur la dépense publique, même s’il réfute toute volonté d’austérité.
Dans sa trajectoire à moyen terme des finances publiques, transmise jeudi au Haut conseil des finances publiques (HCFP), le ministère des Finances prévoit ainsi que le déficit public repassera sous la barre des 3% en 2027, à 2,8%.
Après avoir atteint le niveau record de 9,2% l’an dernier avec les moyens considérables engagés pour faire face à l’épidémie de Covid-19, la baisse envisagée est considérable.
Le ministère de l’Economie défend un objectif “ambitieux” mais aussi “le choix de la sincérité et de la responsabilité”.
Après la récession historique de 2020 (-8,2%), il compte en partie sur le retour dès 2022 au niveau d’activité d’avant-crise, grâce notamment au plan de relance, et à une croissance qui se stabiliserait à 1,4% par an à partir de 2025.
Mais le gouvernement envisage surtout de s’attaquer aux dépenses publiques en ramenant leur hausse à +0,7% par an en moyenne (hors dépenses d’urgence et de relance) jusqu’en 2027, contre une hausse de 1% par an entre 2017 et 2019, et de 1,4% par an durant la décennie 2010.
Pas question de les réduire de manière “brutale”, assure-t-on à Bercy, où on veut éviter le fiasco de l’après-crise financière de 2008, quand la politique d’austérité mise en place à partir de 2011, notamment via des hausses d’impôts, a freiné la reprise.
Montrer les efforts
Pas de hausse d’impôt en vue cette fois donc, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire martelant que, lui à Bercy, cela n’arrivera pas.
Mais des choix à faire sur les politiques publiques jugées prioritaires, avance Bercy, qui ne donne pas plus de détail à ce stade.
Et surtout: poursuivre les réformes structurelles, en particulier celle des retraites, suspendue du fait de la crise sanitaire.
L’enjeu est aussi de montrer à la Commission européenne que la France fait les efforts réclamés depuis des années, et redemandés dans le cadre des 40 milliards d’euros de subventions qu’attend la France du plan de relance européen.
Pour tenir la trajectoire, le ministère de l’Economie plaide pour l’instauration d’une règle pluriannuelle sur la dépense, reprenant ainsi une des recommandations du récent rapport Arthuis sur l’avenir des finances publiques.
Cela pourrait passer par le futur projet de loi organique sur la gestion des finances publiques, porté par le président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale Eric Woerth (LR) et le rapporteur général du Budget Laurent Saint-Martin (LREM).
Ce plan risque d’ulcérer à gauche, où on redoute depuis des mois que le rétablissement des finances publiques soit l’occasion d’”imposer des politiques d’austérité”, selon les mots du leader de La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon.
Décrue du ratio d’endettement après 2025
Le retour du déficit dans les clous des règles européennes qui prévalaient avant leur suspension décidée durant la crise doit permettre de réduire progressivement le ratio d’endettement public, qui a flambé à 115,7% du PIB en 2020.
Dans un premier temps, il continuerait d’augmenter jusqu’à 118,3% en 2025, avant une lente décrue à 117,7% en 2027, selon les prévisions du gouvernement.
Soit encore loin du plafond de 60% prévu dans le Pacte de stabilité européen.
Si, pour Bercy, l’Europe a besoin de “règles communes”, cette règle sur le ratio d’endettement public devrait être “revisitée”, pour ne pas imposer un rythme unique de réduction, alors que les niveaux diffèrent largement d’un Etat à l’autre.
Surtout, tout effort doit attendre la fin de la crise sanitaire. Car celle-ci va encore demander des efforts budgétaires cette année.
Après avoir dépensé près de 160 milliards d’euros en 2020, Bercy prévoit désormais encore 40 milliards d’euros de dépenses de soutien cette année (fonds de solidarité, activité partielle, etc.), et 15 milliards d’euros de dépenses de santé.