C’est plus un ordre de grandeur qu’un chiffre précis, mais il n’est pas anodin. La vaccination contre le Covid-19 en France aurait permis d’éviter 39.100 admissions en soins intensifs (avec une fourchette comprise entre 26.100 et 57.100) et 47.400 décès (entre 36.200 et 62.800), avance une étude menée par l’université de Montpellier avec les CHU de Nîmes et de Caen.
Cette étude , prépubliée le 28 août et en attente de validation des pairs, adopte pour la première fois une approche populationnelle. C’est-à-dire qu’elle met en relief les effets de la vaccination à l’échelle de la population – en sus de l’individu, pour qui les bénéfices du vaccin ont déjà été démontrés lors d’études cliniques. « Elle montre la composante altruiste du vaccin. Lorsqu’on est vacciné, on transmet moins le virus », résume l’épidémiologiste Mircea T. Sofonea, l’un des auteurs principaux de l’étude.
Un cercle vertueux
Pour réaliser cette étude, les chercheurs ont notamment mis en regard le nombre de cas graves et de décès, avec celui des cas positifs dans plusieurs pays à travers le monde. C’est d’ailleurs le « décrochage » entre les deux qui a contribué à déclencher cette étude.
Premier enseignement, « aucune réduction de la mortalité liée au vaccin n’est mise en évidence pour une faible couverture » – le seuil est ici fixé à moins de 30 % de la population n’ayant reçu qu’une première dose de vaccin.
« En revanche, poursuivent les chercheurs, une fois que la moitié de la population est vaccinée, le rCFR (taux de létalité relative) diminue régulièrement de 12,5 % tous les 10 % supplémentaires de couverture ». Les auteurs relèvent « en particulier (que) le taux de létalité des pays européens à forte couverture est désormais quatre fois inférieur à la moyenne des douze derniers mois ».
En France, où la campagne de vaccination a commencé le 27 décembre 2020, les vaccins auraient ainsi permis de réduire le nombre d’admissions en soins intensifs de 46 % et celui des décès de 57 %. Les deux courbes dessinent une trajectoire très proche et partagent un point commun : les effets de la vaccination se font pleinement ressentir à partir du mois d’avril uniquement.
La raison est double. D’abord, la couverture vaccinale était encore trop faible avant avril (3 millions de personnes étaient totalement vaccinées au 31 mars) pour que cela produise un effet à l’échelle de la population. Ensuite, l’épidémie était à un niveau plus faible en début d’année.
Des projections encourageantes
Pour la fin de l’année 2021, les chercheurs maintiennent des chiffres encourageants. Ils projettent que la vaccination aura aidé à éviter 67.000 hospitalisations en soins critiques et 78.000 décès. Et ce, malgré la quatrième vague, le variant Delta et la rentrée. Alors que l’efficacité des vaccins Pfizer et Moderna est tombée de 91 à 66 % selon une étude, la Haute Autorité de santé recommande désormais une troisième dose pour les plus de 65 ans et les publics fragiles.
Au 29 août, 71,8 % des Français avaient reçu au moins une dose de vaccin et 64,6 % avaient reçu les deux doses. Pour Mircea T. Sofonea, « une question récurrente en santé publique est de savoir à partir de quand une campagne de vaccination est efficace, il y a donc besoin de ce type d’effort de quantification pour y parvenir ».
Alors que huit personnes sur dix hospitalisées à cause du Covid ne sont pas vaccinées, cette étude sur l’efficacité vaccinale apporte une nouvelle résonance au slogan utilisé par le ministère de la Santé : « On peut débattre de tout, sauf des chiffres. »