C’est le petit dernier de la famille de la télémédecine. Après la téléconsultation et la téléexpertise , entrées dans le droit commun en 2018, la télésurveillance va à son tour être généralisée dans le courant du premier semestre 2022. La mesure est inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’an prochain , qui sera présenté en Conseil des ministres ce jeudi. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, s’est rendu lundi à l’incubateur des Hôpitaux de Paris, à l’Hôtel-Dieu, afin que cela se sache, mais aussi pour mettre en lumière l’investissement public dans les start-up d’e-santé.
Avec la télésurveillance, l’objectif est de mieux prendre en charge des patients isolés, vivant parfois dans des déserts médicaux. Il s’agit par exemple de surveiller la glycémie de femmes souffrant d’un diabète gestationnel ou le bon fonctionnement du pacemaker des personnes âgées. Des innovations « qui changent la vie des patients », a souligné Olivier Véran, « en soutien du médecin de famille » et « pour casser les distances ». « L’Etat est là pour accompagner ce changement », a-t-il insisté.
Des organisations de télésurveillance
Les professionnels de santé devront se constituer en « organisations de télésurveillance », en se regroupant, mais l’organisation pourra également être formée d’un seul soignant. Après s’être déclarés auprès de l’agence régionale de santé, ils seront rémunérés par l’assurance-maladie pour interpréter les données et prendre les décisions médicales qui s’imposent. Le projet de loi prévoit une rémunération forfaitaire, fixée par arrêté ministériel, en fonction de la fréquence du suivi, de la complexité de prise en charge, des volumes, montants et conditions de recours prévus ou constatés.
De nouveaux équipements numériques connectés et des logiciels vont devoir être agréés pour accéder au remboursement. Il faut donc s’attendre à un appel d’air du côté de l’industrie des dispositifs médicaux, et des start-up d’e-santé. Cela aura un coût pour l’assurance-maladie, même si le budget prévisionnel de la télésurveillance est modeste : 22 millions en 2022 et 44 millions en 2023.
Nouvelles priorités
Le gouvernement avait lancé une expérimentation de télésurveillance en 2018. Le bilan de l’opération Etapes, portant sur cinq pathologies, aurait dû être tiré à la mi-2021 par la Haute autorité de santé, mais l’épidémie de Covid en a décidé autrement. La généralisation a donc été enclenchée sans retour d’expérience.
Depuis 2018, en fait, les priorités ont changé. Emmanuel Macron a annoncé un plan pour l’innovation en santé de 7 milliards d’euros fin juin. La télémédecine a décollé et cela s’est bien passé. La hantise des autorités sanitaires n’est plus de dépenser trop, mais de perdre du terrain dans la compétition industrielle et scientifique mondiale.
Des incubateurs de CHU
Olivier Véran a rencontré ce lundi les dirigeants de Lifen (plateforme pour les applications d’e-santé), Echopen (échoscope portatif connecté), Withings (balance, tensiomètre, etc.), Nouveal (parcours de soins numérisé), Nabla (app de santé des femmes) et Implicity (télésurveillance des pacemakers). Des start-up qui ne sont pas toutes françaises, mais qui se développent dans l’Hexagone avec le soutien d’un centre hospitalier universitaire.
« Nous souhaitons que nos CHU puissent investir dans des start-up », explique-t-on au cabinet d’Olivier Véran, en rappelant que la stratégie d’accélération numérique est dotée de 650 millions d’euros, qui vont permettre d’investir dans l’innovation via des appels à manifestation d’intérêt nationaux – le premier vient de se clore. Les incubateurs comme celui de l’Hôtel-Dieu sont donc encouragés à se multiplier.
Le campus en santé numérique Parisanté , qui doit voir le jour en novembre à Issy-les-Moulineaux et rassembler des organismes de recherche comme l’Inserm, des entreprises, le Health Data Hub, « jouera un rôle pivot dans la structuration de l’offre » et fera office de « guichet unique pour les start-up », ajoute le ministère.