La flambée des prix de l’énergie oblige le gouvernement à lâcher toujours plus de lest. Après le blocage des tarifs réglementés du gaz , annoncé par le Premier ministre, Jean Castex, le mois dernier, l’exécutif envisage maintenant de réduire les taxes sur la facture de gaz dès le début de l’année prochaine. Une mesure qui bénéficierait à l’ensemble des foyers abonnés au gaz, soit 10,5 millions de ménages, et non aux seuls 5 millions abonnés aux tarifs réglementés ou aux offres indexées sur ces tarifs.
« Rien n’est encore décidé », tempère-t-on au sein du gouvernement. Ce qui est d’ores et déjà certain, c’est que le levier fiscal est à la main du gouvernement. Un amendement au projet de loi de Finances , en passe d’être voté, autorise l’exécutif à réduire la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN). D’un montant de 8,43 euros par mégawattheure, elle représente en moyenne 12 % de la facture.
Une baisse « indispensable »
«Rien ne garantit que nous soyons amenés – j’allais dire acculés- à actionner ce dispositif», a déclaré le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt. La pression monte pour qu’il soit effectivement actionné. La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a officiellement appelé à une « baisse temporaire » de la TICGN, « dès le 1er janvier 2022 ». « Une telle baisse de taxe est indispensable pour limiter l’exposition financière des fournisseurs et faciliter le rattrapage tarifaire ultérieur », argumente la CRE dans une délibération publiée ce lundi.
Le gel des tarifs réglementés du gaz s’appliquera du 1er novembre 2021 au 30 juin 2022, prévoit le projet de décret soumis pour avis à la CRE. Si les conséquences sont simples pour les clients – aucune augmentation pendant huit mois -, elles sont au contraire particulièrement difficiles pour les fournisseurs . Ils vont en effet y perdre beaucoup durant cette période, car ils continueront à s’approvisionner au prix fort sur les marchés internationaux .
« Une question de vie ou de mort »
Une partie du manque à gagner sera rattrapée ultérieurement. Le décret du gouvernement prévoit une période de « remise à niveau », qui pourra s’étendre jusqu’en juin 2023. Durant cette période, les tarifs augmenteront dans une proportion plus importante que ce qui se serait passé normalement ou bien ils baisseront moins que prévu.
Seulement, cela ne suffira peut-être pas, notamment si la chute des cours internationaux du gaz, attendue au printemps, ne se matérialisait pas. Dès cet hiver, de petits fournisseurs risquent de mettre la clé sous la porte. « Plusieurs d’entre eux ont dû augmenter leurs tarifs, au risque de perdre leurs clients, relève Xavier Pinon, gérant du comparateur Selectra. Pour certains, c’est une question de vie ou de mort. » Même des fournisseurs aux reins solides ont cessé tout recrutement de nouveaux clients pour le gaz, comme le suédois Vattenfall.
Aide aux fournisseurs
C’est pourquoi la CRE appelle à une baisse de la fiscalité, qui permettrait de relâcher en partie la pression et de « faciliter le rattrapage tarifaire ultérieur ». Reste à savoir dans quelle proportion la taxe baisserait et ce que cela coûterait aux finances publiques. La TICGN est censée rapporter 2,35 milliards d’euros l’année prochaine.
Cette mesure aurait l’avantage de bénéficier à tous les abonnés au gaz, même ceux qui ont souscrit des offres à prix fixe et qui n’ont pas subi d’augmentation de leur facture pour l’instant. La Commission recommande aussi « un dispositif d’aide complémentaire aux fournisseurs qui se trouveraient en grave difficulté financière du fait du gel tarifaire ». Un point à l’étude dans les cabinets ministériels.