La course au cloud s’accélère chez les opérateurs boursiers. L’américain CME, leader mondial des marchés de produits dérivés, va passer l’ensemble de ses opérations sur le cloud de Google, a-t-il annoncé jeudi.
Le transfert ne se fera pas du jour au lendemain, compte tenu des enjeux pour la stabilité financière et la sécurité des données des clients. Les deux groupes se sont engagés sur un partenariat de dix ans. Pour sceller cet accord, Google a en parallèle investi 1 milliard de dollars dans le CME en échange d’actions préférentielles sans droit de vote.
Partenariat de long terme
« Pour assurer une transition en douceur, nous allons travailler en étroite collaboration avec nos clients et procéder par étapes », a prévenu Terry Duffy, le directeur général de l’opérateur boursier. Les deux groupes ont déjà travaillé ensemble par le passé. Le CME avait fait appel à Google Cloud pour faciliter la dissémination en temps réel de certaines données de marché dès la fin 2019.
Dans un premier temps, le CME va poursuivre l’année prochaine le transfert de ses activités liées aux données de marché sur l’infrastructure cloud de Google. La compensation, une activité cruciale du post-marché, démarrera sa migration dans le même temps.
Le transfert des activités de marché prendra, lui, plus de temps. Il faut dire que les différentes places de marché opérées par le CME sont parmi les plus importantes au monde. Fondé en 1898 à Chicago, d’où son nom, le Chicago Mercantile Exchange s’est spécialisé sur les produits dérivés liés aux matières premières comme le blé, le soja ou encore le pétrole et l’or, avant de devenir le champion mondial des contrats à terme en tout genre, notamment sur les grands indices boursiers américains.
C’est aujourd’hui l’opérateur boursier le mieux valorisé au monde, avec une capitalisation de près de 80 milliards de dollars.
Une référence de plus pour Google Cloud
C’est donc une belle référence pour Google Cloud. Malgré une présence dans 200 pays, grâce à ses data centers et ses câbles qui relient les continents, le groupe n’occupe « que » la quatrième place du podium mondial, avec environ 6 % du marché du cloud en 2020, selon Gartner. Loin derrière Amazon (41 %), Microsoft (18 %) et le chinois Alibaba (9,5 %).
Mais sa part de marché progresse. Dans la finance, Google Cloud dit travailler avec « 7 des 10 principales entreprises spécialisées dans les marchés financiers », et compte notamment Goldman Sachs, PayPal, Bloomberg, Deutsche Börse, ou encore Refinitiv parmi ses clients. Google propose notamment des services d’open banking, des agents virtuels ou encore des outils pour simuler les risques à grande échelle.
Des milliers de milliards de dollars échangés chaque jour
En 2020, plus de 19 millions de produits dérivés ont été échangés chaque jour sur les différentes Bourses du CME, pour des valeurs nominales totales de plusieurs milliers de milliards de dollars. L’ensemble de ces opérations sont aujourd’hui traitées dans des centres de données physiques gérés par l’opérateur boursier.
Les traders à haute fréquence sont prêts à payer cher pour se rapprocher de quelques centimètres de ces serveurs. Cela leur permet de gagner quelques précieuses millisecondes sur leurs opérations, un avantage sur des marchés pour la plupart entièrement électroniques. Si l’ensemble des opérations passe sur le cloud, le CME devra gérer la transition avec ses clients.
L’opérateur boursier va également devoir montrer patte blanche auprès des régulateurs. Toute menace sur la stabilité financière est prise très au sérieux par les autorités de surveillance.
D’autres opérateurs boursiers sont engagés dans cette voie, en particulier le Nasdaq. La place de marché spécialisée dans les valeurs technologiques a déjà basculé une partie de ses serveurs nord-américains sur le cloud d’Amazon. Le groupe américain, qui détient également la Bourse de Stockholm et d’Helsinki en Europe, souhaite migrer l’ensemble de ses marchés sur le cloud d’ici à dix ans.