Dans deux ans, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) aura fini d’absorber les 136 milliards de nouvelles dettes que la Sécurité sociale doit lui transférer pour supporter les déficits historiques liés à la crise du Covid. Elle met les bouchées doubles et vient de boucler le plus gros programme de financement de ses vingt-cinq ans d’existence, avec 39,4 milliards d’euros levés sur les marchés financiers en 2021.
Cette année, elle aura amorti 17,4 milliards, un montant qui va croissant au fil des ans. Cela porte à 205 milliards d’euros la dette sociale déjà éteinte par ses soins. La Cades, qui présentait ses résultats annuels ce mardi, est encore à mi-chemin, puisqu’il lui restera à peu près l’équivalent à rembourser d’ici à sa disparition programmée en 2033.
Des taux négatifs en 2021
Heureusement que la crise du Covid n’a pas attendu 2022 ou 2023 pour frapper, s’effraie-t-on rétrospectivement à la Cades : en voie d’extinction à horizon 2024, la Caisse aurait disparu des radars des investisseurs institutionnels et des banques centrales qui achètent aujourd’hui par milliards la dette de la Sécurité sociale. Or dans l’épidémie, il a fallu agir vite, beaucoup plus qu’après la crise de 2008 où l’on avait attendu deux ans avant de relancer les émissions d’obligations.
Presque deux ans après le début de la crise, la Cades jongle avec des volumes toujours plus importants et bénéficie de vents favorables. Tout d’abord, ses ressources ne cessent d’augmenter, portées par la croissance qui dope l’activité et donc les recettes sociales. En 2021, elles se sont élevées à 18,6 milliards d’euros, dont 7,8 milliards de CSG, 8,7 milliards de CRDS et la rente annuelle de 2,1 milliards versée par le fonds de réserve des retraites.
Par ailleurs, le coût moyen de la dette diminue : la charge d’emprunt est passée de 2 milliards à 1,5 milliard en 2021. Il devrait reculer à 1,2 milliard en 2022. Le taux de refinancement de l’encours a chuté à 0,61 %, contre 1,44 % l’an dernier et 1,99 % en 2019.
Cela s’explique à la fois par l’achèvement du remboursement d’emprunts anciens à 4 %, et par le fait que quasiment toutes les nouvelles émissions en 2021 se sont faites à taux… négatif. « Sauf la dernière émission en euros à dix ans, en septembre, en raison de la remontée des taux depuis la fin du printemps », nuance-t-on à la Cades. Avec un taux de 0,12 %, contre -0,13 % pour un emprunt équivalent en janvier, placer de la dette demeure une très bonne affaire.
Même si les taux continuent de monter, cela ne devrait pas trop nuire à la Cades qui aura bouclé son programme de refinancement dans deux ans. « Quand emprunter coûte plus cher, c’est dommage pour le contribuable, mais cela crée de l’intérêt et nous permet d’élargir notre base d’investisseurs », souligne le président de la Cades, Jean-Louis Rey.
Des marges de manoeuvre financières
Du coup, les dirigeants de la Cades, ainsi que ceux de l’Agence France Trésor à laquelle elle est adossée, sont confiants. Toute la dette sociale doit être remboursée d’ici à 2033, et la Cades définitivement fermée. Les échéances imposées par le législateur seront respectées, assurent-ils.
La reprise économique a embelli les perspectives. Le déficit 2021 de la Sécurité sociale sera probablement moins lourd que le montant voté il y a un mois (34,6 milliards) et il devrait baisser en 2022 et 2023.
Si le dérapage est limité à une quinzaine de milliards sur quatre ans, cette dette imprévue pourra être absorbée sans ciller, affirme Jean-Louis Rey : « La courbe de vie de la Cades permet potentiellement de dégager une année supplémentaire, il ne serait donc pas nécessaire d’aller au-delà de 2033 », explique-t-il.
Le scénario médian d’amortissement de la dette sociale annexé au projet de budget de la Sécurité sociale pour 2022 prévoit en effet un apurement complet en 2032, contre 2033 dans le scénario pessimiste et 2031 dans le scénario optimiste.