Le revenu universel d’activité n’est pas mort. Cet autre projet social « systémique » du quinquennat , avec la réforme des retraites, a été abandonné lorsque la crise du Covid a éclaté. Mais au printemps, le rapporteur général Fabrice Lenglart, un haut fonctionnaire du ministère des Solidarités, a repris les travaux. Il vient de remettre au Premier ministre la première version d’un rapport de préfiguration, qui n’est pas encore public.
Jeudi, lors d’une prise de parole au congrès annuel de la Fédération des acteurs de la Solidarité, Emmanuel Macron a expliqué qu’il voulait donner suite à ce rapport et mettre en place le revenu universel d’activité (RUA) : « Je souhaite donc maintenant que nous puissions avancer jusqu’au bout de cette voie », a-t-il déclaré. Le chef de l’Etat se positionne implicitement pour le prochain quinquennat, étant donnée l’ampleur du chantier – qui devait initialement aboutir en 2023 .
Réduire le non-recours
Après deux ans de travaux techniques « d’une ampleur inédite », « nous pouvons désormais affirmer qu’en fusionnant le RSA [revenu de solidarité active], la prime d’activité, les APL [aides personnelles au logement], nous pourrions sortir des centaines de milliers de personnes de la pauvreté », s’est félicité par avance Emmanuel Macron. Cette simplification réduirait le non-recours et accroîtrait la confiance des Français dans le système social.
A ses yeux, la création du RUA « poserait les bases d’un nouveau système social, plus efficace, plus lisible et plus juste, parce qu’il reposerait sur une seule base ressource, qui permettrait de compter de la même façon les ressources des personnes ». Le Conseil d’Etat a récemment recommandé de toiletter ces dispositifs, pour les mêmes raisons.
Créer un « revenu social de référence »
Fondre les 15 bases ressources des 15 prestations solidaires actuelles, afin de créer un « revenu social de référence », l’équivalent du revenu fiscal de référence en matière d’impôts : « la réforme du revenu universel d’activité, c’est cela. Ce n’est pas fondre l’ensemble des prestations dans un gros gloubi-boulga », a expliqué mercredi Fabrice Lenglart, face aux sénateurs de la commission des Affaires sociales.
Par conséquent, « si cette réforme se fait », les allocations ciblant la pauvreté, le handicap, les retraités indigents continueront à exister séparément, a-t-il poursuivi. « Mais ces barèmes seront cohérents ».
Une prestation s’éteindrait après l’autre
Aujourd’hui, bien souvent, l’assuré modeste touche deux, voire trois prestations sous conditions de ressources à la fois. Quand il accroît son activité rémunérée, elles diminuent simultanément et sans concertation. Dans de très rares cas, cela peut déboucher sur une perte nette. La plupart du temps, cela diminue brutalement le gain attendu, avec pour effet de décourager la reprise d’emploi.
Dans le système proposé par Fabrice Lenglart, il y aurait un « ordre de priorité » : les deux ou trois prestations solidaires ne diminueraient pas simultanément, mais l’une après l’autre. « La deuxième ne baissera que lorsque le niveau d’activité aura fait que la personne n’est plus éligible à la première », a expliqué le haut fonctionnaire.
De nombreuses questions politiques
Son rapport, a-t-il précisé, n’est pas « clés en main », car il faudra encore répondre à de nombreuses questions politiques. Le système social solidaire doit-il être fondé sur la situation familiale ou reposer sur l’individu ? Quel doit être le périmètre de la future base ressource ? Et faut-il y aller d’un coup, ou bien construire le nouveau système par étapes, par exemple en laissant les allocations adultes handicapés de côté au départ ? De beaux débats en perspective.