De nombreuses offres d’emploi non pourvues alors qu’il y a des chômeurs ? Pôle Emploi met à mal cette idée souvent avancée dans le débat public en montrant son côté « marginal » par rapport aux embauches chaque année en France. En 2021, entre 255.000 et 390.000 recrutements ont été ainsi abandonnés faute de candidats, selon une estimation de Pôle emploi publiée jeudi. Un chiffre légèrement plus élevé que lors la précédente étude de 2018 (210.000 à 350.000) mais à comparer aux 9 millions de recrutements de plus d’un mois effectués l’année dernière et aux 28 millions de Français en emploi.
« Le nombre d’offres non pourvues est extrêmement modeste et a un impact marginal sur l’économie », résume Stéphane Ducatez, « Monsieur statistiques » de Pôle emploi. D’autant plus que si l’on raisonne en « équivalent temps plein », cette fourchette n’est plus que de « 180.000 à 273.000 postes ». Pôle Emploi a calculé cette fourchette en extrapolant sur les offres d’emploi clôturées (pourvues ou abandonnées) au troisième trimestre 2021, dans un contexte où le marché de travail reprenait vie avec la levée de restrictions sanitaires en juin.
La difficulté de recrutement, un simple « ressenti »
Selon cette enquête menée auprès de 8.000 entreprises, 85,9 % des offres retirées des listes ont été pourvues (89,4 % en 2018). Environ 3 % ont été annulées à la suite de la disparition du besoin, 5,1 % faisaient l’objet d’un recrutement en cours et 6 % avaient été abandonnées faute du bon candidat (4,9 % en 2018). La moitié des offres pourvues l’ont été en moins de 45 jours, un délai stable par rapport à 2018.
« Cela permet de bien reposer le débat », juge Stéphane Ducatez, alors que le gouvernement, le Medef, la Banque de France ou l’Insee alertent sur les difficultés de recrutement quasi quotidiennement, y voyant un frein à la croissance. M. Ducatez rappelle que « chaque jour, 25.000 contrats de plus d’un mois sont signés en France, dont 12.000 CDI ».
Pour autant, l’opérateur ne nie pas les difficultés de recrutement. Les employeurs sont plus nombreux (68 % contre 57 % en 2018) à les constater, particulièrement dans la construction (75 %) et pour des postes d’ouvriers qualifiés (79 %).
« Mais une difficulté est un ressenti qui ne préjuge pas de l’issue du recrutement. Au final, l’embauche se fait et dans les bons délais mais pas dans les conditions imaginées au départ », résume Stéphane Ducatez. De fait, les deux tiers des employeurs disent avoir élargi leur recherche à des profils différents (moins expérimentés ou moins formés), un tiers a augmenté la rémunération proposée et un tiers a proposé de meilleures conditions de travail.