Débat autour des premiers effets du plan de relance sur l’industrie

Depuis septembre 2020, l'Etat a déjà soutenu 782 projets de relocalisation. Moyennant 1,6 milliard d'euros de subventions et 3,8 milliards d'investissements industriels, 100.000 emplois ont été « créés » ou « confortés ». Les économistes estiment de leur côté qu'il est trop tôt pour évaluer les effets du plan.


Prague, Czech Republic - January 7, 2022: Close up photo of Pfizer's pills on a white backlight background

En plein débat sur la désindustrialisation et la perte de compétitivité du pays, l’exécutif veut prouver les effets positifs du plan France Relance sur les relocalisations d’activités industrielles sur le territoire national. Au total, 782 projets ont été soutenus depuis septembre 2020, ce qui a permis de « créer » ou « conforter » près de 100.000 emplois, a annoncé Bercy ce jeudi, en dévoilant les noms des 72 nouvelles sociétés sélectionnées.

Le gouvernement a entrepris de rapatrier certaines activités ou d’encourager la production en France dans des domaines stratégiques (la santé, l’agroalimentaire, l’électronique, les intrants essentiels de l’industrie et la 5G) au travers de différents dispositifs.

Evaluer la « pertinence du ciblage »

Le soutien de ces 782 projets a permis de générer 5,4 milliards d’euros d’investissements productifs, dont 1,6 milliard d’euros de subventions, indique Bercy.

« Ce résultat s’inscrit dans une politique ambitieuse de reconquête lancée en 2017 », a commenté la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher interrogée par « Le Monde ». Selon les économistes, il est toutefois bien trop tôt pour apprécier quel sera l’impact de France Relance sur le tissu productif.

Ces dernières années, la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière hexagonale dans celle de la zone euro n’a cessé de reculer, passant de 17,9 % en 2000 à 14,7 % en 2019 puis 13,9 % en 2021. « L’effet de levier du plan dépendra de la pertinence du ciblage des subventions », estime Emmanuel Jessua, directeur des études chez Rexecode. En d’autres termes, « les aides soutiennent-elles des projets suffisamment rentables pour produire des effets durables ? », explicite-t-il.

En vingt ans, la France a perdu 1 million de postes dans l’industrie. Les emplois qui naîtront grâce au plan France Relance sont largement suspendus à la réussite des projets retenus. Sur les 100.000 emplois brandis ce jeudi, Bercy ne précise pas quelle est la part des emplois réellement créés et celle des emplois sauvés. « Difficile dans ces conditions d’évaluer quel est le coût pour l’Etat des emplois créés, ce d’autant que ce chiffre inclut probablement aussi des emplois non industriels », observe Patrick Artus, conseiller économique de Natixis.

Inversion de la courbe

A ce stade, l’exercice serait d’ailleurs prématuré, selon le président de France Industrie, Alexandre Saubot. « Le ratio instantané entre les subventions et les emplois annoncés n’est pas légitime. Il faudra attendre que les projets soient vraiment sortis de terre pour mesurer l’emploi industriel qui a été généré », estime-t-il tout en se réjouissant de constater que « l’envie de faire l’industrie n’a pas disparu. La mobilisation des acteurs, notamment les PME et les ETI, en est la preuve tout comme le rebond de l’investissement l’an dernier ». Pour lui, « l’important aujourd’hui est que la courbe soit inversée : la France a arrêté de détruire de l’emploi industriel depuis l’été 2021 ».

Les capacités de production en France sont inférieures de 6 % à ce qu’elles étaient en 2018.

Stéphane ColliacEconomiste chez BNP Paribas

Le tissu industriel continue toutefois de porter les stigmates de la crise sanitaire. « Les relocalisations viennent contrebalancer les fermetures de sites mais je ne pense pas qu’elles les compensent. Les capacités de production en France sont inférieures de 6 % à ce qu’elles étaient en 2018. Et l’industrie est l’une des branches à avoir le moins bénéficié du rebond de l’emploi en sortie de crise », observe Stéphane Colliac, économiste chez BNP Paribas.

Fin 2021 l’emploi industriel accusait encore un déficit de près de 40.000 postes par rapport à l’avant-crise. « La détérioration de la balance commerciale est l’autre facette de la dynamique négative dans l’industrie », pointe Patrick Artus, qui considère que la France garde de gros handicaps : « des coûts toujours trop élevés et la faiblesse des compétences ».


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