L’apprentissage a le vent en poupe, en témoignent les 720.000 contrats signés en 2021 , à telle enseigne que les candidats à la présidentielle se sentent obligés d’y consacrer du temps de campagne. Après ceux de Valérie Pécresse puis d’Emmanuel Macron, les représentants de Yannick Jadot passeront leur oral lundi devant les directeurs de centre de formation (CFA).
En leur soumettant 24 propositions, l’Anaf, l’Association nationale des apprentis de France, les interpelle aussi, quitte, pour un quart d’entre elles, à mettre la lumière sur l’envers du décor : les difficultés financières d’une partie des jeunes qui ont choisi la voie de l’alternance. « Cela fait deux ans que nous alertons le gouvernement, tout le monde est au courant, mais cela ne bouge pas d’un iota », déplore son président, Aurélien Cadiou.
Faute d’avoir encore pu lancer une enquête fouillée, chiffrer l’ampleur du problème n’est pas possible. L’association ne se base donc, pour l’instant, que sur les retours du terrain et des consultations en ligne. Comme elle est de plus en plus connue, de plus en plus de jeunes la contactent pour faire remonter leurs difficultés. Sont principalement concernés des apprentis mineurs ou tout juste majeurs, très dépendants de leur situation familiale.
Aides à l’hébergement ou à la restauration
Dommage collatéral de la réforme Pénicaud de 2018, la plupart des régions ont supprimé les fonds sociaux pour apprentis, qui permettaient notamment de soutenir les ruptures de parcours. L’Anaf propose d’en mettre un en place urgemment. De même qu’elle appelle à une nouvelle grille des salaires, a minima pour les plus bas (27 % du SMIC pour un mineur en 1e année). Ou encore à la mise en place d’un barème établi sur le nombre d’heures travaillées et non pas le salaire, concernant la prime d’activité pour en généraliser l’accès.
Plus spécifiquement, le problème vient aussi des aides à l’hébergement ou à la restauration. L’argent ne manque pas mais les CFA, qui le reçoivent des opérateurs de compétences Opco, ne peuvent le verser que s’ils disposent d’un internat ou d’un restaurant collectif. Le circuit est le même pour l’achat du premier équipement professionnel, et les centres de formation n’ont pas toujours le temps de s’en occuper.
Pas d’aides pour les alternants de la fonction publique
Pour corriger le tir, l’Anaf propose que les aides soient revalorisées et versées directement aux apprentis en fonction de critères à définir. Celle liée au permis de conduire, qui passe par les Opco aussi, ne répond pas aux besoins des mineurs. Il faut la transformer en aide à la mobilité, permettant l’achat d’un vélo ou de titres de transport en commun, plaide l’association.
Pour Aurélien Cadiou, le pire concerne les jeunes employés dans la fonction publique qui est dépourvue d’Opco. « Ils ne touchent donc rien alors qu’un élève de la même classe qui travaille dans le privé peut en bénéficier », pointe-t-il. Autre revendication : tout alternant doit pouvoir aller au bout de sa formation, pour éviter notamment que les jeunes migrants, une fois majeurs, soient reconduits à la frontière. La situation en Outre-mer nécessite une réponse particulière, ajoute l’Anaf.
« Les apprentis ont un contrat de travail et un salaire. On ne peut pas parler de modèle précaire », a réagi le ministère du Travail qui se dit prêt à étudier les situations particulières qui remontrait de l’association.