Les entreprises comme les politiques cherchent à verdir leur image, pour être raccords avec l’urgence climatique. C’est le cas d’Emmanuel Macron, dont le bilan en matière de lutte contre le réchauffement climatique est très critiqué, et qui séduire, dans l’entre-deux-tours, les électeurs soucieux d’écologie, le gouvernement a publié jeudi 14 avril au Journal officiel un décret d’application de l’article 12 de la loi « Climat et résilience » sur la « compensation carbone et les allégations de neutralité carbone dans la publicité ».
Il prévoit l’interdiction à partir du 1er janvier 2023 de telles affirmations, dans toutes les formes de publicité (presse écrite et audiovisuelle, affichage, web…), si n’est pas « produit un bilan des émissions de gaz à effet de serre du produit ou service concerné couvrant l’ensemble de son cycle de vie », c’est-à-dire de l’amont de sa production jusqu’à son élimination ou recyclage éventuel.
Ce bilan doit être accompagné de « la démarche grâce à laquelle ces émissions de gaz à effet de serre sont prioritairement évitées, puis réduites et enfin compensées ». Il est publié sur le site internet de l’annonceur, vers lequel un lien ou QR code doit être présent sur la publicité ou l’emballage portant la mention de neutralité carbone.
Le décret doit permettre « d’assurer la transparence vis-à-vis du public et de prévenir tout risque de « greenwashing », expliquait le gouvernement lors de sa mise en consultation publique en janvier.
Manque d’ambition
Mais des ONG estiment de leur côté que le texte ne va pas assez loin, à l’instar de l’association de défense des consommateurs CLCV, qui dénonce son « manque d’ambition ».
« Mettre un QR code pour renvoyer vers le site, ça ne suffit pas, il faut expliciter les mesures (de compensation) sur le même support et compléter la mention en expliquant que tout produit génère des gaz à effet de serre. Sinon, ça peut être mal interprété par le public qui peut penser qu’un produit n’a pas d’impact sur le climat », explique Lisa Faulet, responsable scientifique et alimentation de la CLCV.
La loi Climat et résilience, adoptée par le Parlement en juillet 2021, avait pour finalité de traduire une partie des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), qui souhaitait « interdire sur tous les supports publicitaires les produits ayant un fort impact sur l’environnement ».
Cette proposition avait suscité une levée de boucliers dans la profession et les mesures finalement retenues en matière de publicité ont été jugées très insuffisantes par la CCC elle-même, lors d’un vote sur la traduction de ses propositions par le gouvernement, avec une note de 2,6 sur 10, la troisième plus mauvaise de toutes.
Et avant même l’entrée en vigueur de la loi, des ONG ont déjà porté sur le terrain judiciaire la question de la mise en avant de la neutralité carbone dans la publicité.
Début mars, Greenpeace France, les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous, avaient ainsi assigné TotalEnergies en justice pour « pratiques commerciales trompeuses », mettant en cause son ambition affichée de neutralité carbone d’ici à 2050 et la présentation du gaz comme l’énergie fossile « la plus propre ».