Amélie de Montchalin va-t-elle rempiler ou passera-t-elle le témoin sur la fonction publique ? En tout cas, le futur ministre en charge du sujet aura un agenda social chargé et délicat dès sa nomination : il ou elle aura pour mission d’ouvrir dans la foulée une négociation salariale avec les syndicats sur une augmentation générale, et à plus long terme sur une remise à plat de la structure des rémunérations.
S’il fallait évoquer un événement récent qui cristallise l’enjeu des discussions qui vont démarrer, c’est bien la revalorisation du SMIC intervenue ce 1er mai , de 2,65 %. C’est la deuxième hausse depuis le début de l’année et peut-être pas la dernière. En huit mois, le salaire minimum légal aura progressé de près de 6 %. Le niveau de cette hausse souligne l’ampleur de l’impact de l’inflation sur le pouvoir d’achat des fonctionnaires.
Climat social tendu
C’est justement l’argument qu’a invoqué le chef de l’Etat pour s’engager durant la campagne à revaloriser le point servant de base au calcul des salaires des agents, après les cinq années blanches de son premier quinquennat. Dans un climat social général tendu, avec une montée des conflits salariaux dans le privé et un marché du travail qui continue de s’améliorer , même s’il faut rester prudent , le sujet est potentiellement sensible et les syndicats ont bien l’intention de négocier âprement.
La hausse du SMIC accroît aussi l’enjeu salarial concernant les carrières des fonctionnaires. En mai, tous les salariés rémunérés sous les 10,85 euros bruts de l’heure vont voir leur salaire porté à ce niveau. La fonction publique est elle aussi concernée. Si 85 % des branches du privé se retrouvent désormais à démarrer en dessous du salaire minimum , ce n’est formellement pas le cas pour le public. Cette fois-ci, le gouvernement a pris soin de relever en conséquence ses bas de grille. Mais cela n’évite pas leur écrasement : les huit premiers échelons de la catégorie C, la moins qualifiée, et même deux échelons de la catégorie B sont passés sous le SMIC.
De quoi alimenter le chantier de la remise à plat de la structure de la rémunération des agents qu’Emmanuel Macron a promis de réformer . Il a d’ores et déjà dit qu’il s’appuierait sur le rapport rendu par Paul Pény et Jean-Dominique Simonpoli en mars, à la suite de la concertation lancée avec les syndicats qui le souhaitaient, sur « les perspectives salariales » à l’automne 2021. Le prochain ministre saura dès son arrivée à quoi s’en tenir. Si la négociation n’a pas commencé, chacun a avancé ses pions. Les fédérations de fonctionnaires ont déjà adressé des contributions sur le sujet.
Enjeux financiers majeurs
Les enjeux financiers sont majeurs. Comme le rappelle Fipeco, le site spécialisé dans les finances publiques, dans une note publiée le 29 avril, une hausse de 1 % de la valeur du point de la fonction publique coûte 2 milliards d’euros (900 millions d’euros pour l’Etat, 600 millions pour les collectivités locales et 500 millions pour les hôpitaux). La masse salariale publique hors cotisations et contributions des employeurs atteignait en 2021 211,1 milliards d’euros, dont 44 % pour les administrations centrales, 30 % pour les administrations locales, et 26 % pour les administrations de Sécurité sociale.