Ralentissement indéniable, mais résistance beaucoup plus forte qu’anticipée toute de même. C’est ce qui ressort de l’estimation provisoire de l’Insee des chiffres de l’emploi salarié au premier trimestre publiée le vendredi. Malgré la panne de croissance enregistrée sur les trois premiers mois de l’année , les effectifs du secteur privé ont progressé de 0,3 % entre fin décembre et fin mars, soit 66.100 postes supplémentaires.
C’est deux fois moins que lors des trois derniers mois de l’année dernière, mais c’est très nettement plus que les 15.000 créations nettes que l’institut statistique national anticipait jusque-là.
Dans le détail, l’emploi intérimaire s’est légèrement replié (−1,4 % soit −11.500 emplois), après connu un bond fin 2021 en partie lié au besoin de remplacement de salariés en arrêt maladie du fait de l’épidémie de variant Omicron. Malgré ce coup d’arrêt, qui fait suite à sept trimestres consécutifs de hausse, le travail temporaire reste au-dessus de son niveau d’avant crise, souligne l’Insee : de +4,8 %, soit +37.500 emplois de plus par rapport à fin 2019, précisément.
L’industrie n’a pas remonté la pente
Hors intérim, l’emploi privé suit les mêmes tendances que depuis la sortie du dernier confinement. Ainsi, dans la lignée des quatre trimestres précédents, l’industrie a très légèrement progressé, gagnant 3.100 postes (+0,1 %). Ses effectifs se sont étoffés depuis fin 2020, mais pas au point de compenser l’hémorragie causée par le Covid (−1,1 % soit −32.900 emplois par rapport à fin 2019).
Locomotive de la création de l’emploi en France, le secteur tertiaire marchand continue de progresser mais montre aussi des signes de ralentissement : le nombre de postes créés, toujours hors intérim, a progressé de 0,3 % après +0,5 % (soit +38.900 après +57.100 emplois). Le solde par rapport à l’avant crise reste très favorable en revanche (+218.300).
Le tertiaire non marchand n’est pas en reste (+1,2 %, soit 29.700 emplois de plus). Dans la construction enfin, l’Insee fait état d’une hausse de 0,4 % à nouveau, soit 6.000 emplois de plus, avec comme pour le tertiaire dans son ensemble, un très net rattrapage sur les deux ans passés (+5,1 %, +73.600 emplois).
« L’emploi a mieux résisté au premier trimestre que ce que nous anticipions mais il peut y avoir un effet décalage. Si le ralentissement de l’activité se poursuit du fait de la crise internationale ou de l’inflation alors cela pèsera sur l’emploi durant les prochains trimestres », a commenté Sylvain Larrieu, chef de la division synthèse et conjoncture du marché du travail de l’Insee.
Le cabinet d’études Asterès souligne lui aussi la bonne lancée de l’emploi au premier trimestre mais anticipe, du fait des conséquences de la guerre en Ukraine qui a cassé la dynamique de la croissance, une évolution moins porteuse sur le reste de l’année. « L’inflation pourrait également conduire les banques centrales à resserrer les politiques monétaires, pénalisant les créations d’emplois », commentent ses économistes, Sylvain Bersinger et Guillaume Moukala Same.