Dans l’attente de sa désignation, le futur ministre du Travail d’Elisabeth Borne est assuré d’une chose : sa prise de fonction interviendra dans un contexte encore porteur sur le front de l’emploi. Même si le contexte international pèse sur l’activité, le taux de chômage a poursuivi sa baisse au premier trimestre, de l’ordre de 0,1 point. Il s’établit à 7,3 % de la population active, soit 2,2 millions de Français. Après le recul six fois plus important du trimestre précédent, on pouvait s’attendre à un coup d’arrêt.
La feuille de route du futur ministre demeure ambitieuse :
· Le plein-emploi : objectif maintenu
La guerre en Ukraine et l’inflation apportent leurs lots d’incertitudes, mais l’objectif affiché par Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle demeure : en finir avec le chômage de masse. Cela implique 2 points de moins de taux de chômage environ pour atteindre 5 % dans cinq ans .
Ces 2 points seront sans doute plus durs à gagner que les 2 obtenus depuis 2017. Cela suppose une amélioration des taux d’emploi des jeunes ou des seniors. Si les embauches restent dynamiques, le gouvernement pourrait aussi compléter sa réforme de l’assurance-chômage en raccourcissant la durée d’indemnisation avec la conviction, malgré l’opposition syndicale, que cela favorise la reprise de travail.
D’un point de vue structurel, le grand chantier s’appelle « France travail », nouvelle organisation de tous les acteurs qui s’occupent des chômeurs ou du RSA. Elle est censée faire gagner les services en efficacité mais les détails restent à dévoiler.
· Les jeunes : ne pas casser la dynamique
Malgré un rebond de 0,3 point au premier trimestre, le taux de chômage des 15-24 ans a baissé de manière spectaculaire depuis le Covid, passant de 21,5 % en moyenne sur les trois derniers mois de 2019 à 16,3 % désormais. Il était encore plus haut au début du premier quinquennat Macron (23,8 %), soit 7,5 points gagnés par une France qui comptait parmi les plus mauvais élèves en Europe.
Cette embellie s’explique en très grande partie par l’essor de l’apprentissage sous l’effet combiné de la réforme Pénicaud de 2018, des généreuses primes à l’embauche du plan de relance et d’une conjoncture très favorable. En témoignent le taux d’emploi des jeunes qui se situe à son plus haut depuis 1991 (34,6 %) et leur taux d’activité, record lui aussi.
Le gouvernement Borne va donc devoir piloter avec doigté la sortie du « quoi qu’il en coûte » de l’alternance pour ne pas casser la dynamique. Après un décollage réussi en quantité , il lui faudra démontrer que le Contrat d’engagement jeune est aussi un gage de qualité et assure un taux d’insertion élevé pour les plus précaires. Les lycées professionnels sont, quant à eux, promis à une réforme d’envergure.
· Les seniors : gros effort à faire
Sur le front du chômage des 50-64 ans, la situation s’améliore mais lentement, cette catégorie d’âge souffrant de préjugés de la part des employeurs. Leur taux de chômage n’a baissé « que » de 1,2 point sur le premier quinquennat Macron (5,6 %) et le taux d’emploi des 55-64 ans reste médiocre.
Pour améliorer la situation, le gouvernement veut remettre à plat les dispositifs de fin de carrière dans le cadre de la très explosive réforme des retraites à venir. Un effort financier sans précédent, plus de 7 milliards, a été consenti depuis 2017 pour la formation des chômeurs de longue durée notamment, au travers du grand plan compétences , mais dont il reste à mesurer l’efficacité.
En septembre dernier, Jean Castex a consacré 1,4 milliard à la formation pour tenter de juguler les problèmes de pénuries de main-d’oeuvre. Là encore, le bilan reste à faire. Face aux grandes mutations industrielles en cours, les budgets associés aux reconversions devront probablement être revus.