Fonctionnaires, retraités, pauvres… Cet été, une foule de Français vont bénéficier de revalorisations spéciales, pour faire face au regain d’inflation du premier semestre. Mais rien n’est prévu, à ce stade, pour les bénéficiaires des aides personnalisées au logement (APL), la prestation sociale qui contribue le plus à réduire la pauvreté, après le revenu de solidarité active (RSA). Un « oubli » qui ne passe pas inaperçu, et que le gouvernement d’Elisabeth Borne voudra peut-être réparer.
Les associations ont demandé à l’exécutif de geler les loyers pour défendre le pouvoir d’achat des locataires. Mais la nouvelle Première ministre leur a répondu dans le « Journal du dimanche » qu’un gel des loyers pourrait être une « fausse bonne idée », car elle nuirait aux retraités qui vivent de la location de leur bien et qu’elle risquerait d’ « assécher les sources de financement des bailleurs sociaux ».
C’est par d’autres mesures que le pouvoir d’achat des locataires est soutenu, a-t-elle plaidé : le SMIC a été à nouveau revalorisé en mai et le gouvernement prévoit d’augmenter le point d’indice des fonctionnaires. Elle aurait pu ajouter que les minima sociaux (RSA, minimum vieillesse…) et les pensions vont être revalorisés par anticipation en juillet , au lieu d’attendre 2023.
Cibler le soutien au pouvoir d’achat
Refusant les « décisions hâtives », la cheffe du gouvernement a renvoyé à l’ouverture d’une concertation sous l’égide du ministre de l’Economie, Bruno Le Maire . A Bercy, on temporise : la demande sera instruite en mettant autour de la table les associations de consommateurs, de locataires, de propriétaires.
Certaines associations réclament aussi une augmentation du montant des APL. Ainsi, Christophe Robert, le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, a plaidé pour une hausse de 10 % dans le cadre du projet de loi sur le pouvoir d’achat de juin. Revaloriser les APL serait un moyen de concentrer le soutien au pouvoir d’achat, sans pénaliser les propriétaires. « C’est mieux ciblé que le gel des loyers, qui profiterait aussi aux plus aisés », plaide-t-il.
Six millions d’étudiants, de travailleurs et d’inactifs touchent cette prestation versée par les caisses d’allocations familiales. Ils souffrent d’autant plus de la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation que ces dépenses pèsent lourd dans leur petit budget.
Sous-indexation et contemporanéisation
Les APL sont revalorisées en octobre en suivant l’indice de référence des loyers et ont donc crû de 0,42 % à l’automne. Mais depuis, les loyers grimpent rapidement. Au premier trimestre, l’IRL était déjà de 2,48 %. Et la vie est plus chère. La tendance de l’inflation est supérieure à 5 % .
Or pendant le premier quinquennat Macron, les allocataires des APL n’ont pas été gâtés. Les charges du fonds national d’aide au logement, qui finance cette prestation sociale, ont chuté de 18,3 milliards d’euros en 2017 à 15,6 milliards d’euros en 2021.
Tout le monde se souvient de la baisse de 5 euros de l’allocation du début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Elle a aussi été sous-indexée trois années durant, de 2018 à 2020. Les APL accession à la propriété ont été supprimées. Quant au forfait charges intégré au calcul de la prestation, il a continué à décrocher par rapport aux factures d’eau ou de gaz, une tendance qui dure depuis quinze ans.
En 2021, les aides ont été « contemporanéisées » , c’est-à-dire ajustées aux revenus des douze derniers mois, plus une révision trimestrielle, avec pour effet une baisse de 1,1 milliard d’euros des prestations versées. Certes, ce changement de mode de calcul est censé mieux refléter la situation des bénéficiaires. Mais la transition a été douloureuse.