La promesse de campagne était simple et efficace pour le candidat Macron : une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (PEPA) triplée, jusqu’à 3.000 euros pour toutes les entreprises et 6.000 euros pour celles ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation. Objectif : faire davantage bénéficier les salariés des résultats des entreprises via un outil très simple. Et qui serait désormais pérenne.
La mise en oeuvre pratique s’avère plus difficile. Car ce qu’il est permis de faire de manière exceptionnelle – une exonération fiscale et sociale totale pour le salarié comme pour l’employeur – ne l’est plus dans le cadre d’un dispositif pérenne, qui plus est renforcé. L’Institut Montaigne a récemment pointé le risque de cannibalisation de l’intéressement et de la participation , moins avantageux (car notamment soumis à la CSG) que la prime Macron.
Principe d’égalité
Mais c’est surtout le Conseil d’Etat qui a conduit le gouvernement à revoir sensiblement sa copie, comme l’indique son avis paru vendredi sur le projet de loi pouvoir d’achat . A la suite d’échanges avec l’instance juridique, l’exécutif a finalement distingué deux régimes différents pour ce dispositif renommé « partage de la valeur ajoutée ».
Le premier régime sera bien pérenne et pourra bénéficier à tous les salaires, y compris au-delà de 3 SMIC, ce qui était une demande forte du patronat pour que les cadres puissent aussi être concernés par la prime Macron. Mais dans ce cas, la prime n’est pas défiscalisée (elle est soumise à la CSG/CRDS et à l’impôt sur le revenu). L’employeur, lui, est exonéré de charges sociales. Il doit en revanche payer le forfait social (20 %), comme pour l’intéressement (sauf dans les entreprises de moins de 250 salariés) et la participation.
Le patronat plutôt satisfait
Le deuxième régime sera transitoire, sa portée étant cantonnée au 31 décembre 2023. Il ne concerne que les salaires en dessous de 3 SMIC, avec cette fois une exonération fiscale complète pour le salarié (ni CSG, ni IR), mais toujours le forfait social à acquitter pour l’employeur. Pourquoi une durée limitée ? Le Conseil d’Etat a jugé que ce dispositif posait plusieurs difficultés « au regard du principe d’égalité devant les charges publiques », notamment le fait que la défiscalisation ne prenait pas en compte les revenus du foyer, alors que la prime pouvait devenir importante.
Il a toutefois estimé que « l’intérêt général qui s’attache, en période de forte reprise de l’inflation, à la mise en place d’un dispositif de protection du pouvoir d’achat qui soit à la fois simple et rapide à mettre en oeuvre par les entreprises » pouvait être admis « à titre exceptionnel et temporaire », suggérant la date limite du 31 décembre 2023 (quand l’exécutif proposait le 31 décembre 2024).
Au final, et sous réserve des modifications pouvant survenir au Parlement, les entreprises auront donc à leur disposition jusqu’à fin 2023 une prime Macron toujours aussi simple d’utilisation et dont le montant maximum sera triplé, mais désormais soumise au forfait social de 20 %, ce dont l’exécutif n’a guère parlé. « Cela va rester attractif dans le contexte d’inflation actuel », estime néanmoins une source patronale. Quand au dispositif pérenne, « on s’aligne exactement sur le régime social de l’intéressement », explique-t-on au sein du gouvernement. Ce qui permettra de contrer les critiques sur les risques de concurrence entre les différents dispositifs de participation.