Le démarchage commercial agressif pour vendre de la formation par téléphone, SMS ou courriel ? Encore quelques mois et cette pratique qui insupporte des milliers de personnes – jusqu’à Elisabeth Borne elle-même, sur son téléphone personnel – pourrait avoir vécu. Une proposition de loi des députés Bruno Fuchs (Modem) et Sylvain Maillard (Renaissance) a été déposée en ce sens ce mercredi, dont les auteurs espèrent la promulgation avant la fin de l’année. « Je m’attends à un consensus général », indique le second, élu de Paris, aux « Echos ». Le gouvernement a apporté son soutien à la démarche.
Avec plus de 2 millions de titulaires du compte personnel de formation (CPF) qui ont utilisé leurs droits pour se former, « force est de constater que cette plateforme fait désormais partie du quotidien des Français », peut-on lire dans l’exposé des motifs de la proposition. « Cependant, ce succès massif du CPF a également ouvert la porte à des pratiques commerciales agressives voire abusives visant à pousser les individus à acheter des formations contre leur gré », déplorent les deux députés.
A l’exemple de MaPrimeRénov’
« Si les fraudes graves telles que l’usurpation d’identité ou le détournement des droits sont peu nombreuses et font l’objet d’un contrôle accru par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), le démarchage agressif constitue aujourd’hui une nuisance réelle qui envahit le quotidien des Français », au détriment de la crédibilité du dispositif ou du secteur de la formation, ajoutent-ils.
Le texte, qui sera examiné en première lecture à l’Assemblée lors de la niche du Modem du 6 octobre, ne comporte que 2 articles et entend reproduire l’interdiction instaurée pour MaPrimeRénov’.
Le premier vise à interdire « toute prospection commerciale des titulaires d’un compte personnel de formation, par voie téléphonique, par message provenant d’un service de communications interpersonnelles ou par courrier électronique visant à collecter leurs données à caractère personnel ». Sont concernés notamment le montant des droits et les données d’identification. Exit aussi la conclusion de contrats, à l’exception « des sollicitations intervenant dans le cadre d’une prestation en cours présentant un lien direct avec l’objet de celle-ci ».
Echange d’informations
Le second article autorise la Caisse des Dépôts (qui gère le CPF), France compétences, l’instance de régulation de la formation professionnelle, et les services de l’Etat compétents à échanger « toute information utile à la prévention et à la détection des fraudes, à la réalisation des contrôles et aux sanctions à prendre en cas de manquement des titulaires de compte et des prestataires d’actions concourant au développement des compétences aux conditions générales d’utilisation » du CPF.
Le gouvernement avait tenté fin 2021 d’interdire le démarchage des titulaires du CPF sans succès, l’amendement introduit durant l’examen au Sénat du budget 2022 ayant coulé avec le rejet du projet de loi par la Haute Chambre. L’ex-députée LREM de la Gironde Catherine Fabre avait ensuite déposé une proposition de loi au printemps restée lettre morte faute de fenêtre d’examen parlementaire.
« En passer par la loi, ce n’est pas la pierre philosophale contre les démarchages abusifs, mais cela envoie un signal clair », estimait alors le directeur des retraites et de la solidarité de la Caisse des Dépôts, Michel Yahiel, dans un entretien aux « Echos » . Contrairement à ce que l’on peut penser, la multiplication des démarchages ne signifie pas que la fraude augmente. « C’est paradoxal, mais comme elle devient plus compliquée, le ratissage par SMS ou appels augmente », assurait-il.
En attendant la promulgation de la loi, le meilleur réflexe reste de raccrocher ou de ne pas répondre aux SMS en cas de doute.