Les députés relancent le débat sur la taxation des « superprofits »

Une mission d'information parlementaire sur la taxation des profits exceptionnels réalisés par des entreprises du fait de la guerre en Ukraine vient de démarrer. Le débat agitera l'examen du projet de budget pour 2023, alors même qu'Emmanuel Macron soutient désormais une « contribution exceptionnelle » imposée aux énergéticiens ayant des « bénéfices indus ».


FILE PHOTO: Industrial facilities of PCK Raffinerie oil refinery are pictured in Schwedt/Oder, Germany, May 9, 2022. The company receives crude oil from Russia via the 'Friendship' pipeline. REUTERS/Hannibal Hanschke/File Photo

C’est décidément le dossier économique le plus sensible de la rentrée. Alors même qu’Emmanuel Macron annonçait ce lundi le soutien de la France à la création d’un « mécanisme de contribution européenne » des opérateurs énergétiques ayant des « bénéfices indus », les parlementaires étaient justement en train de remettre sur le métier la question de la taxation des superprofits réalisés par certaines entreprises depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine .

Une mission d’information conduite par Manuel Bompard (LFI) et David Amiel (Renaissance), rassemblant des députés de la majorité et des oppositions, a tenu ce lundi une première réunion et des auditions débuteront la semaine prochaine. Objectif : boucler les travaux juste avant l’examen du projet de loi de finances pour 2023, en octobre.

« Je ne vois pas comment le gouvernement peut continuer de s’y opposer, alors que de plus en plus de pays adoptent cette taxe », lance Eric Coquerel, président de la commission des finances. Le député LFI – qui compte participer aux « dialogues de Bercy » lancés par le ministre du Budget, Gabriel Attal, pour déminer les sujets avant les discussions sur le projet de loi de finances – est certain « qu’une majorité de députés est favorable à la mesure », y compris donc au sein de la majorité.

Bénéfices exceptionnels

Les annonces du chef de l’Etat risquent de pimenter et de complexifier un peu plus le débat. La solution européenne poussée par Emmanuel Macron vise spécifiquement les « opérateurs énergétiques dont les coûts de production sont très inférieurs aux prix de vente sur le marché ». En clair, tous les producteurs d’électricité (sauf ceux utilisant des centrales à gaz), ce qui est loin de recouvrir toutes les cibles visées par les oppositions à gauche.

Ainsi le député socialiste Boris Vallaud, interrogé sur France 2 ce lundi, a dit viser les multinationales qui « réalisent plus d’un milliard de chiffre d’affaires ». Pour lui, une définition des « superprofits » pourrait consister à comparer les bénéfices qu’elles dégagent cette année à « la moyenne de leurs résultats et du chiffre d’affaires avant la Covid » et à identifier ce qui relève d’une rente ou d’un investissement.

Hypothèse d’une surtaxe

Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, abonde. « Ce qui compte, c’est de distinguer les bénéfices qui explosent sans qu’il y ait une innovation particulière ; par exemple ceux de CMA CGM sont devenus les plus importants des entreprises françaises, du fait de l’environnement mondial », poursuit-il. L’économiste estime lui aussi qu’il sera difficile, pour des raisons budgétaires, d’éviter une surtaxe et rappelle que cela s’est déjà fait. En 1995, le gouvernement d’Alain Juppé avait instauré une surtaxe d’impôt sur les sociétés de 10 % mais qui touchait toutes les entreprises sans distinction.

Interrogé lors d’une rencontre avec l’Association de la presse économique (Ajef), le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici a quant à lui jugé « qu’il ne s’agit pas d’un débat tabou, c’est une option possible ». « Il y a un climat européen, un certain nombre de pays voisins l’ont fait, y compris les conservateurs britanniques. Mais la vraie question, c’est qui taxer et comment ? Et là c’est compliqué », a exposé l’ancien ministre de François Hollande.

Majorité divisée

Il reste à voir désormais si la majorité va trouver dans la déclaration d’Emmanuel Macron une porte de sortie à un débat qui la divise. Une partie des députés Renaissance a ainsi montré son intérêt pour une taxation exceptionnelle. « J’observe que des entreprises […] ont vu leurs bénéfices grimper de façon exceptionnelle sans investissement ou prise de risque majeurs, par le seul effet de la conjoncture », a ainsi pointé la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, lundi sur France Inter, qui veut « plus d’équité et de justice sociale dans le pays ».

Sitôt dévoilée l’annonce d’Emmanuel Macron sur la « contribution obligatoire » des énergéticiens, l’un des plus chauds partisans de la taxation exceptionnelle au sein de la majorité, le député Sacha Houlié, a d’ailleurs fait un tweet triomphal : « Une contribution (taxe) européenne des énergéticiens qui réalisent des bénéfices (profits) exceptionnels ? Je dis oui », a-t-il écrit.

Pour autant à Bercy, on estime que les annonces du chef de l’Etat ne changent rien à la position gouvernementale. « La contribution des énergéticiens, nous la pratiquons déjà en France et elle va rapporter 8 milliards pour les seules énergies renouvelables. Surtout le président de la République n’a pas parlé de taxe », assure un proche de Bruno Le Maire. Le ministre de l’Economie a répété son opposition à toute forme de taxation ou de contribution obligatoire – il promeut une solution alternative, celle du financement d’un « fonds vert » par les groupes sur une base volontaire.


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