Retraites : une démarche syndicale unitaire inédite qui porte la marque de la CFDT

Devenue premier syndicat français en 2018, la CFDT a pris du poids dans l'intersyndicale. Mais ce qui fait sa force, c'est un fonctionnement très collectif, sans visions hégémoniques, y compris sur les modalités de mobilisation.


Ils ne se quittent plus. Une nouvelle fois, mardi 31 janvier, les leaders des huit syndicats français seront tous là, dans le cortège de tête de la manifestation parisienne, avec pour objectif d’amplifier la première mobilisation réussie contre la réforme des retraites, le 19 janvier.

Personne n’aurait parié sur la constitution d’une telle unité syndicale il y a quelques mois encore. Puis les Cassandre ont annoncé un feu de paille. Mais le collectif tient. « Tout le monde est extrêmement attentif à ne pas abîmer le mouvement », résume François Hommeril, président de la CFE-CGC.

Premier syndicat français

La centrale de Laurent Berger n’en est pas le seul artisan, mais elle y occupe une place centrale. « Si la mobilisation est à ce niveau, c’est aussi parce qu’elle est dedans », constate François Hommeril. En 2019, contre la tentative de réforme systémique d’Emmanuel Macron , soutenue par la CFDT, la mobilisation avait été bien moins forte.

Mais si la CFDT est aussi plus visible qu’en 2010, quand l’âge légal de la retraite avait été relevé de 60 à 62 ans, c’est qu’elle a pris du poids dans l’intersyndicale. Cela fait plus de quatre ans qu’elle a gagné ses galons de premier syndicat français au détriment de la CGT jusque-là, sans traduction concrète. Il est d’ores et déjà acquis que ce conflit l’aura installée au centre du paysage social. Un événement le symbolise : c’est son secrétaire général, Laurent Berger, qui a lu au nom de tous la déclaration commune à la Bourse du travail le 10 janvier, et cette prise de parole n’a pas fait débat entre les organisations, y compris avec le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.

Pas le seul porte-parole

La CFDT n’est pas pour autant le seul porte-parole du mouvement, tant s’en faut. Tous les leaders syndicaux multiplient les expressions publiques. Mais la bataille se cristallise médiatiquement dans la confrontation entre l’exécutif et la centrale. Emmanuel Macron versus Laurent Berger.

Dernier exemple en date samedi 28 janvier. Dans une interview au « Monde », publiée le matin, Laurent Berger jugeait qu’il « faut encore une ou deux démonstrations de force » pour que le gouvernement « prenne conscience du puissant rejet que son texte suscite ». Le regard tourné vers la rue mais aussi vers le passage au Parlement, qui démarre ce lundi, Elisabeth Borne lui répondait le soir sur Franceinfo que le report de l’âge de départ à 64 ans « n’est plus négociable ».

Celui qui en déduirait une vision pyramidale de l’intersyndicale ferait cependant une erreur. « On fait tous tout pour que ça se passe bien », explique Dominique Corona, chargé des retraites à l’Unsa. Le moteur de cette dynamique se trouve dans les relations de confiance tissées par Laurent Berger et Philippe Martinez, même lorsqu’ils étaient en conflit ouvert.

« Tant qu’ils s’entendent bien, ils arriveront à anticiper les petites fractures », dit un membre de l’intersyndicale, évoquant un « leadership sans vision hégémonique ». La dynamique a été renforcée par l’attitude de Force ouvrière, qui, avec Yves Veyrier comme avec Frédéric Souillot, son successeur élu en juin, est convaincue de l’intérêt de la démarche unitaire et « sait mettre du liant ».

Le sujet sensible des modalités d’action

Au premier rang des sujets sensibles, il y a cependant celui des modalités d’action. Historiquement, la CFDT est attachée à des journées de mobilisation espacées, avec si possible un samedi pour les « deuxièmes lignes », tandis qu’à la CGT on prône le blocage du pays et beaucoup sont hostiles aux journées « saute-mouton ». Il n’y a pour autant pas eu d’affrontement sur le sujet dans l’intersyndicale.

Marie Buisson, que Philippe Martinez souhaite voir lui succéder à la tête de la CGT, a bien expliqué pourquoi sur France Inter, il y a quelques jours : « Bien sûr il faut des grèves, mais ce n’est pas au siège des organisations syndicales que [ça se décrète], ce n’est pas si facile de perdre une journée de salaire. »

Pas à pas

Le choix d’avancer pas à pas sans corseter les initiatives et le succès du 19 janvier a conforté les syndicats dans cette démarche. « On décide ensemble ce qu’on fait ensemble… Entre-temps, bien évidemment, chacun joue sa partition et personne n’est obligé de la partager », a précisé, samedi, Laurent Berger.

Il a expliqué qu’à la CFDT « on pense que le niveau d’efficacité syndicale ne se mesure pas au niveau d’emmerdements concrets pour les citoyens ». Pour l’heure, ce sujet n’en est pas un, la grève reconductible est abordée avec une extrême prudence par les syndicats les plus remontés, comme la CGT-pétrole ou leurs camarades cheminots, qui renvoient son examen dans une dizaine de jours. Quant aux cégétistes de l’énergie, aux coupures de courant ils ont en définitive préféré faire renaître les Robins des bois et réduire la facture de certains usagers.


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