La réforme des retraites, la France « au travail » et la question des salaires n’étaient pas les seuls plats au menu d’Emmanuel Macron, à l’occasion de sa visite au marché de Rungis. Le prix des carburants s’est aussi invité dans les discussions.
Interpellé sur le sujet par plusieurs salariés, le président de la République a remis la pression sur le groupe TotalEnergies pour qu’il fasse un nouveau geste. « Je souhaite que le dialogue puisse se finaliser entre le ministère et les entreprises concernées comme cela avait été fait l’année dernière sur les carburants avec des ristournes à la pompe qui avaient été faites par les entreprises comme Total », a-t-il déclaré.
Indemnité carburant depuis début 2023
Déclencheur de la crise des « gilets jaunes » à l’automne 2018, le prix de l’essence est devenu un indicateur de la grogne sociale que l’exécutif surveille comme le lait sur le feu. En 2022, face à la flambée des prix, il a mis en place une remise à la pompe – 30 puis 10 centimes par litre – et Total avait suivi le mouvement en mettant en place son propre dispositif, pour un coût de 550 millions d’euros.
Depuis le début de l’année, c’est une indemnité carburant qui a pris le relais : 100 euros par salarié éligible, pour 10 millions de foyers concernés. Si le dispositif a été prolongé d’un mois jusqu’à la fin du mois de mars, comme l’a annoncé la semaine dernière le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, toutes les personnes éligibles n’y ont pas recours.
La ristourne, elle, est automatique mais coûte très cher, tandis que l’indemnité nécessite une démarche de la part des personnes concernées. Les prix à la pompe se stabilisent depuis plusieurs jours mais restent à des niveaux très élevés (autour de 1,85 euro ces derniers jours).
Bénéfices record
Annoncés le 8 février dernier, les bénéfices record de Total en 2022 – plus de 19 milliards d’euros – se sont invités dans le débat. Lors des discussions parlementaires sur la réforme des retraites, la gauche s’est emparée du sujet. D’une part pour dénoncer ces profits, d’autre part pour demander leur taxation. Par ce biais, les députés de gauche ont trouvé un nouvel angle d’attaque contre le gouvernement, accusé de favoriser les grands groupes au détriment de ceux qui ont plus de mal.
Dans ce contexte, difficile pour Emmanuel Macron d’éviter le sujet : le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français, et l’inflation demeure à un niveau très élevé. Si Bruno Le Maire espère qu’elle baissera à partir de l’été, il faut, pour le gouvernement, passer le cap du printemps et ne pas voir les colères se cristalliser. Dans leurs rencontres avec les Français, nombreux sont les parlementaires et ministres à constater qu’ils sont plus interpellés sur l’envolée des prix que sur la réforme des retraites.
Ne pas rallumer un foyer de contestation
« Je sais l’esprit de responsabilité de nos grands producteurs et revendeurs et je pense que c’est important dans une période où l’on a besoin d’accompagner nos compatriotes », a insisté Emmanuel Macron dans les allées de Rungis. Avant une nouvelle journée de mobilisation contre la réforme des retraites le 7 mars – les syndicats appellent à mettre le pays à l’arrêt – l’exécutif ne veut pas rallumer un nouveau foyer de contestation. Les prix du carburant resteront sous pression au cours des mois à venir, notamment en raison de la guerre en Ukraine , qui ne donne aucun signe d’apaisement .
De son côté, TotalEnergies n’exclut pas une nouvelle remise à la pompe. Mais en la conditionnant à la non-perturbation des livraisons de carburant et au franchissement du seuil symbolique des 2 euros par litre, avait précisé son directeur général, Patrick Pouyanné, au moment de la publication des résultats. « Si le litre de gazole dépasse 2 euros, TotalEnergies pourrait mener de nouvelles actions ciblées de rabais à la pompe », avait-il déclaré au « Parisien ».
Apparemment, Emmanuel Macron n’entend pas que le seuil des 2 euros soit atteint pour que Total déclenche une nouvelle aide.