Au fil des indicateurs, la tendance se confirme : l’activité économique en France en ce début d’année se révèle meilleure que ce que prévoyaient les experts fin 2022. Ce qui rejaillit forcément sur le moral des chefs d’entreprise. En février, le climat des affaires global du pays, mesuré par l’Insee, regagne 1 point à 103, au-dessus donc de sa moyenne de long terme qui est de 100. Exception faite du bâtiment où il se replie, il progresse dans tous les autres secteurs.
« Nous sommes agréablement surpris. Il y a certes un ralentissement. Mais la situation est très éloignée de ce que l’on pouvait craindre il y a deux mois », reconnaît Patrick Martin, le président délégué du Medef. Après avoir redouté à l’automne un scénario catastrophe avec la crise de l’énergie, les patrons sont rassérénés. Ils n’ont pas le sentiment que leur activité est affectée à ce stade.
82 % d’optimistes
« La crise de l’énergie n’a pas entraîné de chocs d’une intensité extrême. Les prix ont reflué et le temps passant, on arrive à la fin de l’hiver. C’est un soulagement », observe Bruno Cavalier, chef économiste chez Oddo-BHF.
Bonne nouvelle, les enquêtes de l’Insee traduisent aussi un certain optimisme pour les prochains mois. Dans l’industrie manufacturière, les prévisions de production s’améliorent « nettement » : les difficultés d’approvisionnement s’atténuent et les carnets de commandes se redressent. Dans les services aussi, les perspectives générales et personnelles d’activité sont de plus en plus solides.
Cette situation rejoint le tableau dessiné par les patrons mi-janvier dans un sondage réalisé par le Medef auprès de 600 chefs d’entreprise : 82 % s’étaient déclarés optimistes sur la situation de leur entreprise. Cette confiance se reflète dans le climat de l’emploi qui reste proche de ses plus hauts, à 110.
L’économie française devrait donc continuer de croître, mais modestement. L’Insee table sur une hausse de 0,2 % du PIB au premier trimestre comme au deuxième.
Interrogations sur l’emploi
Mardi, l’indice PMI de S&P Global pour février avait, lui aussi, mis en évidence « une croissance de l’économie française pour la première fois depuis octobre 2022 », faisant toutefois entendre une voix un peu différente de l’Insee, avec une nouvelle contraction de l’activité dans l’industrie et une hausse dans les services.
Joe Hayes, l’économiste de S&P Global, s’est toutefois montré prudent pour la suite : « Il est difficile de savoir si le point d’inflexion a été atteint et si l’économie française se situe désormais sur le chemin de la reprise. » « Ces indicateurs ne changent pas dramatiquement les perspectives pour les trimestres suivants, où la croissance de l’activité devrait rester assez faible », écrit pour sa part Charlotte de Montpellier, économiste chez ING France.
C’est aussi l’opinion de Bruno Cavalier. Selon lui, la croissance économique de l’Hexagone au cours des prochains mois est suspendue à deux facteurs : la résilience de l’emploi et la dynamique de l’inflation. « Pour l’instant, le marché de l’emploi tient. Et cela a été un facteur de soutien de la demande des ménages. Mais cette bonne résistance va-t-elle perdurer ? » s’interroge-t-il alors que de premières alertes apparaissent. Les créations d’emploi ont connu un coup d’arrêt au quatrième trimestre et les déclarations d’embauche de plus d’un mois ont reculé de 2,4 % en janvier, selon l’Urssaf.
Quant aux hausses de prix, elles ne sont pas terminées. En France, le pic d’inflation n’est pas encore passé. Les prix du gaz se sont certes calmés, mais « les effets en cascade des augmentations passées continuent de se diffuser dans l’économie », relève Bruno Cavalier. En d’autres termes, de nouvelles hausses sont à venir. « Si l’économie chinoise redémarre brutalement, on risque d’être surpris par le rebond des prix de l’énergie au deuxième trimestre », prévient Ludovic Subran, chef économiste du groupe Allianz.
Dans les enquêtes, les Français ne cachent pas leur inquiétude face à la valse des étiquettes. « Cela pèse sur la demande finale tout comme sur le climat social », relève Patrick Martin.