Qu’elles semblent loin, les grandes déclarations franco-allemandes du 22 janvier ! Pour ce qui concerne l’énergie, le texte conjoint signé par Emmanuel Macron et Olaf Scholz à l’Elysée, il y a deux mois à peine, est resté lettre morte.
Paris et Berlin sont plus que jamais à couteaux tirés sur des questions essentielles pour l’avenir énergétique de l’Europe comme le nucléaire, l’hydrogène ou la fin des véhicules thermiques . «C’est surtout le nucléaire qui reste la pomme de discorde entre les deux pays. C’est un sujet où une approche conflictuelle prime, alors que l’on pourrait aussi souligner la complémentarité des préférences respectives», commente Yann Wernert, du centre Jacques-Delors à Berlin.
« Dialogue de sourds »
« On n’est pas arrivés, reconnaît-on au sein de l’exécutif à Paris. C’est souvent un dialogue de sourds. A chaque nouveau texte européen qui vient sur la table, on retrouve les mêmes positions de part et d’autre et on a beaucoup de mal à trouver un compromis. »
La France se satisfait, pour l’instant, du texte proposé par la Commission européenne pour réformer le marché de l’électricité , car il reconnaît la place du nucléaire. « Mais il faudra rester vigilant car le texte va évoluer au cours de la négociation », prévient la même source. Même chose pour le compromis trouvé ce week-end sur l’interdiction des véhicules thermiques . Paris « regardera de près » le texte réglementaire demandé par l’Allemagne, et que la Commission doit présenter à la fin de l’année.
Inclure le nucléaire
La France veut aussi obtenir des modifications dans le texte européen pour « une industrie à zéro émission nette » , présenté il y a quelques jours par la Commission. Ce projet prévoit un élargissement du champ des aides d’Etat et une accélération des procédures d’autorisation pour les technologies « vertes » comme les éoliennes ou les batteries, mais le nucléaire n’est couvert qu’à la marge. Paris voudrait qu’il soit plus largement inclus dans le texte. « Il faut continuer à se battre sur ce point », explique la même source.
La France se bat surtout sur une directive européenne fixant des objectifs pour les énergies renouvelables. Elle veut que l’hydrogène produit à partir d’électricité nucléaire puisse être pris en compte, ce que refusent l’Allemagne et d’autres pays. Des minorités de blocage sont en place dans les deux camps, ce qui empêche l’adoption du texte. Les ambassadeurs des Vingt-Sept se sont réunis lundi pour tenter d’avancer.
Une alliance de douze pays
Ce mardi, le sujet du nucléaire reviendra sur la table lors d’un conseil européen des ministres de l’Energie à Bruxelles. La France rameute ses alliés. Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique, participera à une réunion avant le conseil avec l’ensemble des pays qui défendent la place du nucléaire. Le ministère assure en compter douze, dont la Pologne et la plupart des pays d’Europe centrale, les Pays-Bas, la Finlande ou encore la Suède.
La France et l’Allemagne multiplient les rencontres pour trouver des compromis. Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont abordé le sujet vendredi à Bruxelles. Mercredi, Agnès Pannier-Runacher rencontrera son homologue Robert Habeck à Berlin. « Le dialogue a repris, on peut avancer », veut-on croire à Paris.