L ‘inflation en France descend une première marche et tombe en dessous de 5 %. En juin, la hausse des prix à la consommation a ralenti pour atteindre 4,5 % sur un an, en net repli après 5,1 % en mai selon l’estimation provisoire publiée par l’Insee. Un niveau qu’elle n’avait pas connu depuis mars 2022 et qui s’approche déjà des 4,4 % prévus par l’institut à la fin de l’année. Comme beaucoup d’économistes le prédisaient, l’inflation semble bien avoir atteint au pic au premier semestre.
Tout, ou presque, a contribué au reflux : grâce au recul des prix des produits pétroliers, l’énergie a désormais une contribution négative à l’inflation. Dans les rayons alimentaires aussi , les prix galopent toujours (+13,6 %) mais un peu moins qu’en mai (14,3 %).
Pas d’accélération dans les services
La surprise vient des services qui déjouent les pronostics. Alors que les économistes redoutaient une accélération des tarifs, c’est l’inverse qui se produit : pour le deuxième mois d’affilée, l’inflation se replie, à 2,9 % (contre 3,3 % en avril). In fine, seuls les prix des produits manufacturés enregistrent un petit sursaut (+0,2 %) lié au début des soldes plus tardif cette année qu’en 2022.
Effets des politiques publiques
La France suit donc la même trajectoire que la zone euro qui a elle aussi annoncé ce vendredi une forte décrue de son inflation, passée de 6,1 % en mai à 5,5 % en juin, mesurée par l’indice des prix harmonisé (IPCH). Calculé par le même indicateur, le taux d’inflation s’élève à 5,3 % dans l’Hexagone, contre 6,4 % en Italie (après 7,6 %) ou même 1,9 % en Espagne, premier pays à voir son inflation ramenée sous la barre des 2 %. L’Allemagne en revanche enregistre une nouvelle poussée des prix.
« Les trajectoires de chacun des pays reflètent les effets des politiques publiques mises en place il y a un an et les modalités de fixation des tarifs notamment énergétiques », observe Julien Pouget, chef du département de la conjoncture de l’Insee. Grâce au bouclier sur les prix du gaz et de l’électricité et aux ristournes à la pompe, l’inflation en France a ainsi été l’une des plus basses de la zone euro en 2022. Les mécanismes mis en place par l’Etat ont masqué la progression réelle des cours de l’énergie.
Les effets de comparaisons devraient donc être moins favorables dans l’Hexagone qu’ailleurs en 2023. « Du fait du bouclier tarifaire qui a limité les hausses des prix du gaz et de l’électricité, la baisse de l’inflation énergétique pourrait être moins marquée en France que dans les pays où ces prix ont davantage augmenté l’an dernier », explique l’expert de l’Insee.
Avec l’arrêt du bouclier sur le gaz le 30 juin, « la trajectoire de prix en France est désormais similaire à celle observée en Allemagne et en Italie », note Charles-Henri Colombier chez Rexecode. Les cours du gaz ayant plongé, l’impact devrait cependant être limité. Sauf remontée brutale.
Signaux rassurants
Dans ce contexte, certains experts estiment que l’inflation totale pourrait être plus élevée dans l’Hexagone qu’ailleurs cet automne et à la fin de 2023. « Tous les pays de la zone vont connaître peu ou prou la même dynamique cette année. Mais il est possible que l’inflation en France soit en moyenne supérieure à celle de la moyenne de la zone euro », estime François Rimeu, stratégiste senior à La Française AM.
Pour la plupart des économistes, le reflux de l’inflation devrait toutefois se poursuivre au second semestre. Sur le front de l’alimentation, les dernières données de l’Insee envoient des signaux rassurants. « Pour la première fois depuis janvier 2021, les prix à la sortie des usines dans le secteur agroalimentaire sont en baisse en mai sur un mois », relève Julien Pouget, tout en soulignant qu’« ils restent encore supérieurs de 30 % à leur niveau de 2021 ».
Les cours des produits agricoles refluant sur les marchés mondiaux, l’espoir est de voir la poussée des prix dans les rayons se calmer d’ici la fin 2023. Même si pour l’instant, les renégociations commerciales entre industriels et distributeurs peinent à avancer malgré les injonctions de Bercy.
Progression des rémunérations
Dans le scénario de l’Insee, les services qui représentent la moitié de la consommation des Français devraient devenir le premier facteur de l’inflation d’ici la fin de l’année, devant l’alimentation, tirés par l’augmentation des rémunérations. Confortés par un marché du travail toujours solide, les salaires (hors primes) progresseraient de 4,6 % en 2023 selon l’Insee.
En attendant, la consommation reste affaiblie. En mai, les dépenses en biens des ménages ont certes rebondi de 0,5 % sur un mois en volume. Elles restent toutefois 3,6 % inférieures à ce qu’elles étaient un an plus tôt. Les prochains mois seront encore difficiles, car les prix resteront élevés même si l’inflation baisse.