Taxes sur l’alcool : le gouvernement temporise face à la fronde des députés

Le projet d'indexation des taxes sur l'inflation fait l'objet d'un tir de barrage de nombreux élus, y compris dans la majorité. La mesure, dont le rendement atteindrait au maximum 300 millions d'euros, est fragilisée. Le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, dit avoir « conscience du désarroi des viticulteurs ».


Le projet n’a pas encore été détaillé qu’il est déjà férocement combattu et sérieusement fragilisé. En quête de recettes pour boucler les budgets de l’Etat et de la Sécurité sociale, le gouvernement a mis sur la table en juillet l’indexation sur l’inflation des taxes sur l’alcool . Avec un exemple à suivre : ce qui a été voté l’an dernier sur le tabac, sans faire de vague.

Actuellement, outre la TVA, les boissons alcooliques se voient appliquer des droits d’accise dont le niveau varie fortement en fonction du degré d’alcool et, au-delà de 18 degrés, une cotisation additionnelle. Ces droits sont revalorisés selon l’inflation, mais en fonction des prix de l’année N-2 (ce qui crée un décalage) et avec un plafond à 1,75 %, jugé caduc dans le contexte actuel, surtout au vu de l’évolution des prix dans l’alimentaire.

Levée de boucliers dans la majorité

D’où l’idée de supprimer ce plafond et de se baser sur l’année N-1, ce qui conduirait à une hausse des droits d’environ 5 % l’année prochaine, en fonction de l’inflation constatée. Ce schéma a permis au gouvernement d’aboutir à une hausse du prix des cigarettes d’environ 7 % cette année , et les prix des produits du tabac augmenteront automatiquement encore sensiblement début 2024 sans qu’il y ait besoin de modifier à nouveau les règles.

Problème : à peine éventé par Bercy auprès des parlementaires, le projet a suscité une levée de boucliers des élus « viticoles », y compris au sein de la majorité présidentielle. Comme l’a relaté le site Vitisphere , 44 d’entre eux (membres du groupe d’études « vignes et vin » à l’Assemblée) ont écrit au gouvernement le 18 juillet pour le mettre en garde contre « une augmentation excessive des taxes » qui « pourrait mettre en péril la compétitivité de nos producteurs et nuire à la vitalité de nos régions viticoles déjà en crise pour quelques-unes d’entre elles ».

Parmi les signataires figure notamment… Thomas Cazenave, élu de Gironde et devenu depuis ministre des Comptes publics ! Ce dernier a d’ailleurs assuré jeudi à Talence « ne pas avoir changé d’avis » : « J’ai conscience du désarroi et des difficultés économiques des viticulteurs, avec par-dessus une calamité, le mildiou. »

Un autre groupe de 27 députés, d’opposition cette fois (dont bon nombre d’élus RN), a également interpellé le ministre de l’Agriculture pour dénoncer une hausse de taxe « qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour le secteur ». Et de fait, Marc Fesneau s’est dit lui aussi réticent, cette semaine auprès de la filière, à toute augmentation de la fiscalité du vin.

Le gouvernement sur le reculoir

Le vin, très peu taxé comparativement aux autres boissons alcoolisées, ne serait pourtant que marginalement concerné. L’indexation aboutirait à une hausse de 0,3 centime par bouteille l’année prochaine. « Il faudrait acheter trois bouteilles de vin pour arriver à un centime de plus », souligne un défenseur du projet, excédé par l’activisme du lobby viticole. Pour une bouteille d’alcool fort, la ponction fiscale supplémentaire se situerait entre un et deux euros.

Difficulté supplémentaire : le mécanisme d’indexation concerne tous les droits d’accise sur l’alcool. Le vin ne peut être dissocié, sauf à revoir l’ensemble de la fiscalité des boissons alcoolisées, mais c’est un peu tard.

Dans ce contexte, les membres du gouvernement réunis autour d’Elisabeth Borne, en fin de semaine dernière, pour préparer le budget 2024 de la Sécurité sociale ne se sont guère montrés enthousiastes à l’idée de déclencher une bataille parlementaire, pour obtenir au maximum 300 millions d’euros de recettes supplémentaires. D’autant que la filière des spiritueux est aussi très mobilisée. Le tweet du secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, enjoignant l’exécutif « d’arrêter de taper sur les classes populaires », a également marqué les esprits.

L’arbitrage a été renvoyé à la rentrée, et dépendra d’autres décisions en suspens (arrêts maladie, médicaments, etc.). « Les discussions se poursuivent avec le ministère de la Santé », a indiqué Thomas Cazenave ce jeudi. Mais pour les élus favorables à la mesure, poussée par un rapport d’information de l’Assemblée nationale en juin , le recul de l’exécutif paraît acquis.


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