Apple Pay est plus que jamais dans le collimateur de Bruxelles. Lundi, à l’issue d’une enquête préliminaire, la Commission européenne a accusé Apple d’abuser de sa position dominante sur les marchés des portefeuilles mobiles sur les appareils iOS .
Dans une décision attendue par de nombreux acteurs du paiement mobile, la firme à la pomme se voit reprocher de limiter l’accès de la puce « Near Field Communication » (NFC, également appelé « tap and go ») des iPhone aux autres applications de paiement.
En réservant à sa seule solution propriétaire, Apple Pay, l’accès à cette technologie « normalisée, disponible dans presque tous les terminaux de paiement en magasin » et garantissant « une sécurité et une fluidité maximales », le géant américain empêcherait l’émergence de toute concurrence.
Difficultés de Paylib
« Une telle situation produit des effets d’éviction pour ses concurrents, affaiblit l’innovation et restreint le choix des consommateurs en ce qui concerne les portefeuilles mobiles sur iPhones. Aux fins de l’intégration des marchés européens des paiements, il est essentiel que les consommateurs bénéficient d’un paysage des paiements concurrentiel et innovant », insiste Margrethe Vestager, la commissaire à la Concurrence.
En France par exemple, l’impossibilité d’accéder à l’antenne NFC des iPhone est l’une des raisons avancées pour expliquer les difficultés de Paylib, l’outil lancé par plusieurs grandes banques, à décoller dans le paiement en magasin par smartphone.
Apple a désormais accès au dossier et pourra répondre aux accusations. Si l’entreprise est reconnue coupable, elle devra remédier à ses pratiques ou s’exposer à des amendes pouvant atteindre 10 % de son chiffre d’affaires annuel.
Rouvrir le marché
L’affaire s’inscrit dans le cadre d’un effort plus large de l’Europe pour ouvrir le marché des paiements mobiles . En matière de droit de la concurrence, Apple Pay reste aussi sous le coup d’autres griefs potentiels, encore en cours d’enquête. Mais c’est du volet réglementaire que vient la plus grande offensive de l’Europe.
Le « Digital Market Act » (DMA), la nouvelle arme anti-Gafam adoptée en mars et dont l’entrée en vigueur est ambitionnée en 2024, indique que les géants du Net devront « permettre aux développeurs d’applications d’accéder dans des conditions équitables aux fonctionnalités auxiliaires des smartphones », dont les puces NFC. Le DMA doit donner aux autorités nationales et européennes les moyens d’agir plus vite et plus fort en cas de non-respect.
Paiement fractionné
Au-delà des NFC, le texte, par son caractère très transversal, doit rouvrir le jeu de la compétition à l’ensemble de l’écosystème des paiements, comme par exemple aux applications de paiement fractionné (Buy Now, Pay Later ou BNPL), un segment en plein essor où beaucoup craignent de voir Apple tenter de nouveau d’imposer sa propre solution, intégrée à Apple Pay.
En réponse, Apple justifie les restrictions d’accès par son souci d’assurer la sécurité pour ses clients et indique qu’« pple Pay n’est qu’une des nombreuses options offertes aux consommateurs européens pour effectuer des paiements ». Naturellement, la marque à la pomme indique que « nous continuerons à collaborer avec la Commission pour garantir que les consommateurs européens aient accès à l’option de paiement de leur choix dans un environnement sûr et sécurisé ». Naturellement, Bruxelles est sceptique.