Les prix alimentaires, qui ont encore affiché une hausse de 14,1 % en mai, devraient bel et bien s’assagir dans les prochaines semaines. C’est en tout cas ce que promet Bruno Le Maire. Le ministre de l’Economie, qui réunissait les géants de l’agroalimentaire en fin de semaine dernière, annonce qu’ils se sont engagés à baisser, dès le mois de juillet, les prix de « plusieurs centaines de produits » touchés par la flambée de l’inflation.
Cet engagement a été pris à l’unanimité par « les 75 plus gros industriels », a affirmé Bruno Le Maire vendredi matin au micro de BFMTV. « Cela concernera plusieurs centaines de produits de consommation courante. Je pense aux pâtes, aux huiles, à la volaille, aux céréales, à l’alimentation animale », a-t-il énuméré. La liste précise des marques et produits concernés lui sera transmise dans les jours qui’ viennent, a-t-il ajouté.
Contrôles de la DGCCRF
Ces « remises en fond de rayons » pourraient aller jusqu’à 10 %, a affirmé le ministre. Les grands industriels du secteur de l’agroalimentaire ont donc accepté une indexation anticipée pour que la baisse ait lieu dès le mois prochain, a-t-il expliqué, « alors que s’il n’y avait pas eu d’indexation anticipée, cela aurait été vers octobre, septembre voire plus tard ».
Mais Bruno Le Maire prévient : la liste lui permettra, conjointement avec la DGCCRF, de contrôler cet engagement de manière très précise. « La confiance c’est bien, les contrôles c’est mieux. Si l’une de ces grandes multinationales ne joue pas le jeu, son nom sera révélé au public », a-t-il prévenu, ajoutant néanmoins « faire confiance » aux industriels.
Menace fiscale
Ceux-ci se sont par ailleurs engagés à rouvrir les négociations commerciales. La demande leur avait déjà été faite à plusieurs reprises par Bruno Le Maire, qui a de nouveau brandi, ce vendredi, la menace de la taxation . Comme le mois dernier, il s’est dit prêt à utiliser l’outil fiscal pour ponctionner les marges de ces grands industriels. « Le taux de marge des entreprises de l’agroalimentaire a fortement progressé au cours des premiers mois de l’année 2023. Ils ont plus que rattrapé les pertes qu’ils avaient faites dans les deux années passées », a-t-il rappelé.
Les engagements des entreprises
Il y a plusieurs cas de figure parmi les entreprises agro-alimentaires classées parmi les 75 les plus grosses sur la base des volumes vendus. Quatre à cinq groupes de cette liste ont déjà réouvert les négociations avec les distributeurs suite à la baisse du prix des céréales. C’est notamment le cas des grands groupes de pâtes comme Barilla. Et de LDC, qui commercialise les poulets de Loué.
Le volailler a d’ailleurs annoncé son intention de baisser les prix le 24 mai à la presse. « Nous avons obtenu des distributeurs une revalorisation de nos tarifs de 40 % en deux ans pour compenser la hausse de toutes nos charges. On va revoir nos prix à la baisse mais pas dans cette proportion, car nos charges ont augmenté. En revanche, nous allons remonter le niveau des promotions à 30 %, contre 20 % sur l’exercice écoulé », avait alors expliqué Philippe Gélin, le directeur général. Une quinzaine d’entreprises a décidé d’anticiper les clauses d’indexation des prix sur les matières premières.
35 groupes auraient répondu à la menace de Bercy de taxer les marges en promettant des efforts de promotion immédiats. Sur les trois prochains mois. Au total, environ 70 entreprises, outre les 5 qui ont déjà rouvert les négociations, seraient d’accord pour réviser leurs tarifs d’un façon ou d’une autre. Plusieurs secteurs ont été exonérés de ces efforts par le gouvernement en raison du niveau toujours élevé des matières premières qu’ils transforment. C’est le cas de l’industrie du lait et c’est également celui de la viande bovine.
Des incompréhensions
L’ILEC (Institut de liaisons et d’études des industries de consommation) s’est dit « satisfait de ce deuxième échange avec les différents ministres, Bruno Le Maire, Roland Lescure et Olivia Gregoire, et serein quant à la volonté des industriels et à leurs initiatives […] en vue d’une baisse des prix sous diverses formes ». L’Ania (Association nationale des industries agroalimentaires) a pour sa part indiqué à Bruno Le Maire « ne pas comprendre les conclusions du rapport de l’inspection des finances sur l’accélération des marges de l’industrie agro-alimentaire sur le premier trimestre 2023. Ce n’est pas la réalité que nous vivons », a expliqué aux Echos Jean-Philippe André le président de l’Ania.
La décision a été prise de « travailler ensemble avec les services du l’Etat sur ce sujet pour comprendre comment l’Inspection des finances était parvenue à cette conclusion ». Un précédent rapport publié en décembre 2022 avait pointé une baisse des marges des entreprises de 16 % sur la période précédente.