Carburants : les plus aisés premiers bénéficiaires de la ristourne à la pompe

Selon une étude du Conseil d'analyse économique, la crise énergétique n'a pas entraîné une « dégradation forte et généralisée » de la situation financière des ménages. La remise sur le prix à la pompe a bénéficié deux fois plus aux ménages aisés qu'aux foyers modestes.


Alors que l’exécutif s’apprête à accroître la ristourne à la pompe en vue de trouver un accord avec les députés LR à l’Assemblée, le Conseil d’analyse économique (CAE), un organisme rattaché à Matignon, apporte un éclairage qui devrait animer le débat.

Dans une étude sur « la situation financière des ménages en début de crise énergétique », il montre en effet que ce sont les plus aisés qui profitent le plus de la mesure pour une raison simple : ce sont aussi les plus gros consommateurs d’essence.

« Ils dépensent 200 euros par mois en essence contre 100 euros pour les plus modestes », a indiqué, ce vendredi, sur France Inter, le président délégué du CAE, Philippe Martin. En euros, la remise de 18 centimes sur le prix à la pompe a bénéficié deux fois plus au dernier décile de revenus qu’au premier décile : « 18,50 euros contre 9,50 euros » précise la note. « Les rabais sont des mesures relativement inefficaces et coûteuses » jugeait récemment Philippe Martin dans une interview aux Echos.

Ajustement de dépenses

Réalisée à partir des données de comptes bancaires mises à disposition par le Crédit Mutuel Alliance Fédérale à la fin juin, l’enquête met en évidence les difficultés des Français face à la crise énergétique.

Ainsi, pour un tiers des ménages, les frais de carburants représenteraient au moins 8 % de leur consommation. Ce qui les rendrait « dépendants » de l’essence. Une « petite moitié » d’entre eux seraient « contraints financièrement ». Parmi eux, les ménages ruraux et périurbains, les ouvriers et les employés, les jeunes, les détenteurs d’un faible patrimoine financier sont surreprésentés.

Et le CAE constate que, plutôt que de restreindre leur consommation de carburant face à l’envolée des prix, cette population a préféré ajuster ses autres dépenses. Ce qui lui a permis de conserver un budget constant en valeur.

Les plus modestes avaient déjà utilisé, à l’été 2021, le surcroît d’épargne accumulé pendant la pandémie de Covid-19. Ce qu’avait déjà montré une étude du CAE en mars . Malgré la flambée des prix, ce qui leur restait d’économies, en euros, n’a pas bougé entre juin 2021 et juin 2022, et a donc été écorné par l’inflation.

Pas plus de comptes courants dans le rouge

Au final, le comportement précautionneux des moins aisés, conjugué aux nombreuses mesures de soutien aux ménages engagées depuis l’automne 2021 par l’exécutif (revalorisation du chèque énergie, plafonnement des prix du gaz et de l’électricité etc.), a évité une « dégradation très forte et généralisée de la situation financière des ménages du fait de la crise énergétique et du retour de l’inflation », selon l’étude.

Ainsi, le nombre de foyers dont le compte courant est dans le rouge n’a pas augmenté. Sauf chez les retraités qui maintiennent leurs dépenses au même niveau qu’avant la crise et ne puisent pas dans leur épargne. « Ce qui suggère que leur consommation réelle baisse », selon le CAE.

Quant aux ménages les plus aisés, leur bas de laine s’est certes légèrement dégonflé au cours des derniers mois. Mais il demeure bien rempli. Selon l’étude, « en juin 2022, leur stock d’épargne serait supérieur de plus de 10 % » à ce qu’il était avant la crise sanitaire.


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