C’est une configuration inédite pour le patronat français. L’année 2023 sera marquée non seulement par un changement à la présidence du Medef , mais aussi à celle de l’Association française des entreprises privées (Afep). Laurent Burelle, dirigeant de Plastic Omnium, s’apprête à passer la main à la tête de ce puissant lobby regroupant les 115 principales entreprises françaises.
Difficile pour autant de comparer les deux situations. A l’Afep, pas de candidature ni de campagne électorale façon Medef, l’ambiance « club select » s’impose. « Le choix se fait par cooptation de ses pairs, à l’ancienne. Il faut susciter de l’adhésion », souligne un très bon connaisseur de la maison. Un temps, Ross McInnes, président du conseil d’administration de Safran, avait imaginé instiller un peu plus de transparence dans l’exercice, mais il a dû rapidement revoir ses ambitions.
Changement de ton
Le choix reste donc avant tout dans les mains des 15 grands patrons membres du conseil d’administration, dont Laurent Burelle, qui suit avec attention le dossier. « Rien n’est encore décidé », assure le bon connaisseur de la maison. Au-delà de la question de la gouvernance, le profil de Ross McInnes ne convainc pas complètement, du fait de sa proximité avec l’Etat – il a coprésidé le comité CAP 2022 sur la réforme de l’Etat pendant le premier quinquennat Macron. Le nom de Marie-Christine Coisne-Roquette, présidente de Sonepar, a fuité ces dernières semaines dans la presse et est considéré comme une sérieuse possibilité.
Quoi qu’il arrive, que l’on parle d’élection au Medef ou de cooptation à l’Afep, le changement de tête dans le patronat pourrait préfigurer un changement de ton. Depuis cinq ans, celui-ci n’a guère eu à se plaindre de la politique menée par Emmanuel Macron, qui a multiplié les gages en sa direction. Une relation à deux sens : dès son élection, en 2018, Geoffroy Roux de Bézieux avait annoncé un « Medef de propositions » après le « Medef de combat » de Pierre Gattaz des années Hollande ; quand Laurent Burelle est considéré comme un clair soutien du chef de l’Etat. Durant l’élection de 2022, le patronat a encore largement penché en faveur de ce dernier.
Le vent est-il en train de tourner ? « La politique pro-entreprises va être de plus en plus difficile à mener avec un gouvernement empêtré par sa majorité relative à l’Assemblée, cela va nous demander un dirigeant prêt à aller à l’affrontement », estime le bon connaisseur de l’Afep. « L’Etat est de plus en plus interventionniste, nous avons besoin d’un patronat très réactif », juge un membre influent du Medef.