Est-ce un signe supplémentaire de la place incontournable prise par l’écologie dans le débat économique ? Les organisations patronales ont accueilli les mesures préconisées par la Convention citoyenne sur le climat avec de nombreuses réserves, mais prennent bien soin de ne pas apparaître en opposition frontale contre cette initiative. « Nous partageons complètement les objectifs, nous saluons le sérieux de la démarche mais un certain nombre de propositions demandent à être regardées de plus près pour voir lesquelles peuvent aboutir et dans quel délai », estime Patrick Martin, le président délégué du Medef. « Comme souvent dans des assemblées participatives, il y a une émulation intéressante du point de vue des idées, mais on en perd le sens du réalisme », avance François Asselin, le président de la Confédération des PME (CPME).
Le ton aurait peut-être été moins conciliant si la proposition de réduction du temps de travail à 28 heures par semaine n’avait pas été finalement abandonnée . « Cet abandon est un signe de la maturité des travaux des 150 citoyens », estime Patrick Martin. Celui-ci se félicite également de voir certaines des propositions du Medef reprises, comme la création d’un « CO2-score » pour signaler les produits particulièrement polluants.
Plusieurs mesures dans le viseur
Pour autant, cela ne vaut pas blanc-seing, loin de là, pour l’ensemble des propositions . « Nous trouvons que l’exercice n’est pas complètement abouti dans la mesure où il n’y a pas de chiffrage ou d’évaluation économique globale », poursuit Patrick Martin. Dans le viseur, l’obligation de rénovation thermique des bâtiments sous peine de sanction – « comment faire quand le coût de la rénovation vaut autant que le prix de la maison ? » s’interroge le dirigeant du Medef – ou l’interdiction des vols intérieurs de moins de 4 heures « qui peut entraîner une fracture territoriale ou des dommages sociaux ». L’opposition est plus nette encore sur la taxe sur les dividendes, « alors que les entreprises ont au contraire besoin actuellement de fonds propres et donc d’investisseurs ».
Au-delà des mesures, la philosophie générale qui se dégage des propositions n’est pas sans susciter des critiques. François Asselin (CPME) relève ainsi que trois verbes reviennent comme un leitmotiv dans les propositions : interdire, obliger et taxer. « C’est assez révélateur de la volonté d’amener tout un pays vers un nouveau modèle avec des mesures avant tout coercitives », juge le dirigeant de l’organisation représentant les petites et moyennes entreprises. Celui-ci regrette par exemple « une mesure comme l’interdiction des centres-villes aux voitures les plus émettrices de CO2 qui va revenir à bannir les moins riches, quand il faudrait une écologie incitative qui embarque le plus grand monde ».
Tonalité trop décroissante
Le constat n’est guère différent du côté de l’U2P (Union des entreprises de proximité), qui fédère les TPE-PME. Alain Griset, son président, avoue ne « pas être vraiment convaincu par cette méthode du tirage au sort ». Surtout, il regrette « une tonalité globale qui ne correspond pas trop à une vision du monde de l’entreprise » et une démarche des 150 citoyens « échouant à concilier écologie et développement économique et de l’emploi ». « Certes, on ne peut plus parler de croissance à tout prix, mais ce que j’ai vu des mesures penche bien trop du côté de la décroissance », estime le dirigeant.