L’heure est au déconfinement et à la reprise de l’activité jugée urgente par Matignon et Bercy. Mais le gouvernement planche aussi sur la rentrée de septembre. Avec à la clé un plan de relance qui devrait être bouclé fin août. Et des consultations tous azimuts d’ici là, menées notamment par le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire.
Nécessité de soutenir à la fois l’offre et la demande , alors que les caisses sont vides : on savait déjà l’équation complexe. Il s’y ajoute une préoccupation qui va croissant au sein de l’exécutif : la perspective d’une rentrée épouvantable pour les jeunes, diplômés ou non, qui vont arriver sur un marché du travail à l’arrêt, alors que des vagues de licenciement sont redoutées dans les prochains mois.
« L’accès à l’emploi des jeunes est une question absolument vitale qui devra être une des priorités du plan de relance, et même une priorité nationale, souligne Bruno Le Maire. Il faut mesurer l’angoisse des centaines de millions de jeunes qui s’apprêtent à démarrer dans la vie sans aucune perspective. » Une préoccupation partagée au ministère du Travail : « Aujourd’hui, on est concentré sur la reprise, mais assez rapidement on va se poser la question des plans de relance et une des très hautes priorités portera clairement sur la jeunesse », confiait Muriel Pénicaud la semaine dernière.
Pas de retour du CPE
Pas question de ressortir un nouveau contrat de travail, type CPE, ce sont plutôt des mesures classiques de prise en charge d’une partie des cotisations, en cas d’embauche, qui sont à l’étude. Avec évidemment un risque élevé d’effet d’aubaine. Dans une interview aux « Echos » , le président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, Eric Woerth (LR), prône un « dispositif zéro charge employeur pendant deux ans pour les jeunes diplômés ».
Nicolas Sarkozy avait appliqué dans le plan de relance post-crise de 2008 une mesure « zéro charge » à l’embauche dans les TPE (moins de dix salariés), pendant un an pour les salaires au niveau du SMIC (et avec des cotisations dégressives jusqu’à 1,6 SMIC). Avec une certaine efficacité selon les travaux d’évaluation des économistes Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo. François Hollande avait aussi appliqué une prime à l’embauche de 4.000 euros pour les PME de moins de 250 salariés en 2016. Dans les deux cas, les dispositifs n’étaient pas réservés aux jeunes.
Renforcer les fonds propres des PME
Avant les arbitrages, Bruno Le Maire entend consulter de façon très large (groupes parlementaires, économistes, patronat, syndicats, etc.) pour nourrir le plan de relance et mesurer le rapport coût efficacité de chaque mesure. Côté patronal, une suggestion lui a par exemple été faite cette semaine, lors d’échanges avec l’Afep (grandes entreprises), de trouver des mécanismes financiers permettant de transformer en fonds propres ou quasi fonds propres des reports de charges ou des prêts garantis qui ne pourront être remboursés, afin de soutenir les entreprises dans la phase de reprise. Il a missionné Jean Lemierre, le président de BNP Paribas, sur le sujet.
En attendant le plan de relance, Bercy travaille à plus court terme sur les plans sectoriels de soutien aux filières en difficulté (tourisme, automobile, aéronautique), qui devront être bouclés mi-juin. Etant donné les grandes difficultés du secteur automobile en particulier, des incitations renforcées à l’achat de véhicules propres (primes de conversion) devraient être mises en oeuvre dès juillet, afin d’éviter que les acheteurs n’attendent la rentrée. « Il a toujours été clair qu’il ne fallait pas attendre la rentrée », souligne le ministre des Finances. Les achats de véhicules de flotte d’entreprise vont aussi être soutenus.
Une prise en charge toujours élevée pour l’activité partielle
Inversement, un début de retour à la normale est envisagé sur la prise en charge de l’activité partielle pour les employeurs, alors que le cap des 12 millions de salariés potentiellement couverts vient d’être franchi. Si le régime très généreux actuel sera maintenu au-delà du 1er juin pour les secteurs subissant toujours des fermetures administratives (hôtellerie-restauration, événementiel, etc.), la prise en charge devrait être ramenée à 90 % dans un premier temps (au lieu de 100 %), ce qui reste un haut niveau et devrait convenir aux entreprises. C’est en tout cas la proposition conjointe de Bruno Le Maire et Muriel Pénicaud à Matignon. L’indemnisation des salariés restera, elle, inchangée, à 84 % du salaire net.