Les vents de la reprise sont toujours porteurs. Bercy vient de relever sa prévision de croissance de l’économie française de 6 % à 6,25 % pour 2021 se rapprochant ainsi des projections des grands instituts de conjoncture (Insee, Banque de France…). Et un consensus est en train de se dessiner sur ce qui attend le pays en 2022 : une croissance toujours forte, autour de 4 %. C’est en tout cas le chiffre retenu à ce stade par le gouvernement, l’OCDE et le FMI (3,9 %).
« L’année va commencer avec un acquis de croissance de 2 %. Il suffira donc d’avoir une hausse du PIB de 2 % pour atteindre l’objectif. Mais je ne pense pas qu’on sera très au-delà car au second semestre, la France va retrouver ses standards de croissance habituelle, de 1 à 1,5 % », observe Philippe Waechter, chef économiste d’Ostrum Asset Management.
170 milliards d’euros fin 2021
Les incertitudes sont, certes, nombreuses . Elles concernent aussi bien les prix du pétrole et du gaz que les tensions sur les approvisionnements, l’impact du ralentissement de l’économie chinoise ou encore l’inflation. Même le rebond des prix s’annonce plus long et plus fort qu’anticipé précédemment, les conjoncturistes s’accordent à penser qu’il sera transitoire et redescendra en deçà de 2 % courant 2022. « 0,1 point d’inflation en plus, cela fait 0,15 point de moins de croissance annuelle », calcule Ludovic Subran, chef économiste du groupe Allianz.
Beaucoup d’économistes se retrouvent aussi sur un autre sujet : la France, comme les autres pays développés, a une réserve de croissance supplémentaire qui tient à la surépargne accumulée par les ménages depuis la crise du Covid. Dans l’Hexagone, elle devrait atteindre 170 milliards d’euros à la fin de l’année. Ce qui équivaut à « 11 % du revenu annuel des Français » selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). De ce fait, « il y a probablement de bonnes surprises à attendre en 2022 de ce qui se passera sur la consommation des ménages », estime son président Xavier Ragot.
Croissance à 6,2 %
Une chose est en tout cas certaine, selon Mathieu Plane, économiste à l’OFCE : « Alors qu’en 2021, l’investissement a soutenu la reprise, en 2022, ce sera la consommation des ménages qui sera le moteur de la croissance ». L’économie française va dépendre de l’envie de dépenser des Français et par conséquent, de leur comportement d’épargne.
L’OFCE évoque deux scénarios « sans trancher entre les deux ». Le premier prévoit une hausse du PIB de 4,1 % en 2022. Il « implique un retour du taux d’épargne à son niveau d’avant-crise au second semestre 2022 », souligne l’institut. A savoir, un retour à un taux d’épargne de 15 % du revenu disponible brut, contre plus de 21 % ces derniers mois. En d’autres termes, il n’y aurait plus d’épargne de précaution mais les Français ne puiseraient pas non plus dans leur bas de laine. L’inflation tomberait alors à 1,5 % en 2022 ( contre 2,2 % sur un an en septembre ) tandis que le déficit public s’établirait à 5 % du PIB. Ce scénario, proche de celui de l’exécutif, serait toutefois conservateur.
Inflation à 1,5 % ou à 2,4 %
L’OFCE envisage un autre cas de figure : celui où les ménages désépargneraient un cinquième de leur épargne Covid en 2022. Le PIB bondirait alors de 6,2 %. Le dynamisme de l’activité tirerait néanmoins les prix à la hausse et porterait l’inflation à 2,4 %. Grâce à la croissance soutenue, le déficit public serait ramené à 3,8 % du PIB. L’institut fait valoir une série d’arguments pour attester du réalisme de ce scénario : le gigantesque bas de laine constitué pendant la pandémie est « liquide et donc, facilement mobilisable ».
De plus, l’austérité budgétaire ou fiscale n’est pas dans l’agenda de l’exécutif. Enfin, « nous avons eu une bonne surprise. La consommation est très vite revenue à son niveau d’avant crise dès qu’on a allégé les restrictions sanitaires », observe Mathieu Plane.
Si les planètes semblent alignées, reste ce constat formulé par Patrick Artus, chef économiste de Natixis : pour l’instant, « l’épargne n’est pas consommée et sert plutôt à acheter des actions et de l’immobilier ».