C’est une première dans l’étude des ressorts de l’insertion professionnelle. Le ministère du Travail a publié jeudi les résultats, riches d’enseignements, d’un testing sur l’impact de l’expérience et de la formation ultérieure sur le devenir des décrocheurs scolaires.
Ses conclusions ne sont pas révolutionnaires au sens où elles montrent, d’une part, que l’acquisition initiale d’un diplôme maximise les chances d’insertion dans le monde du travail et que, d’autre part, expérience comme qualification acquises ultérieurement augmentent les chances de trouver un emploi pour les jeunes ayant quitté le système scolaire sans rien. Mais l’étude permet de mesurer l’ampleur de cet effet de rattrapage et celle-ci est majeure.
L’enjeu est de taille. Si le nombre de décrocheurs scolaires a bien baissé ces dernières années, ils sont encore quelque 100.000 à sortir sans diplôme du système scolaire chaque année. Sans compter l’impact de la crise sanitaire cette année à la suite du confinement , voire l’an prochain…
Prime à la formation initiale
Le testing, qui s’est déroulé en 2018, a consisté à envoyer près de 11.000 candidatures masculines avec pour seule différence entre les envois le parcours scolaire et professionnel en réponse à des offres prises sur le site de Pôle emploi pour deux métiers : cuisinier et maçon. Des métiers pour lesquels des recrutements parfois sans diplôme existent.
Cécile Ballini, de la direction de la recherche du ministère du Travail (Dares) et Jérémy Hervelin, du Centre de recherche en économie et statistique (Crest) se sont penchés sur les réactions des employeurs en fonction du profil, entre les diplômés, les non diplômés inactifs pour la deuxième année consécutive, les non diplômés en contrat aidé (emploi d’avenir) et les non diplômés ayant cumulé un tel emploi pendant un an avec une formation professionnelle certifiante. Prise de contact, demande d’informations complémentaires, proposition d’entreprise ou carrément d’embauche… Ces réponses positives ont été compilées pour donner des « taux de rappel » en les rapportant au nombre de candidatures d’un même type de profil.
Les efforts paient
Les candidatures de jeunes sortis du système scolaire avec un CAP ont obtenu un taux de réponse de 27,9 % quand il n’est que de 10 % pour les décrocheurs inactifs pendant deux ans. Mais l’expérience professionnelle et plus encore le CAP obtenu après le décrochage sont un vrai plus, avec respectivement un taux de rappel de 21 % et 21,9 %, soit deux fois plus qu’un décrocheur qui ne peut afficher ni l’un ni l’autre.
Le résultat le plus marquant est cependant celui des jeunes qui ont cumulé une expérience professionnelle et une formation. Leur taux de rappel, de 26,1 %, n’est qu’à peine inférieur au taux de rappel des jeunes sortis du système scolaire avec un CAP. Avec une quasi-égalité pour les maçons (23,3 % contre 23,6 %) et un peu moins bon pour les cuisiniers (23,3 % contre 28,8 %). Cette conclusion, qui montre que les efforts paient nettement, vient appuyer le soutien aux jeunes décrocheurs développé dans le cadre de la garantie jeune.
L’étude montre aussi que les emplois aidés, décriés par certains, sont une aide à l’insertion importante pour les jeunes décrocheurs en leur permettant d’acquérir une expérience professionnelle. Reste à savoir si les emplois aidés que le gouvernement a décidé de relancer bénéficieront à ce public ou à celui des jeunes diplômés entrant dans un marché du travail totalement déprimé.