Encore quelques mois et la réorganisation de l’Unédic sera une affaire réglée. L’association paritaire qui gère le régime d’assurance-chômage va se séparer des 220 salariés en charge de la gestion opérationnelle de l’Assurance garantie des salaires (AGS), le régime patronal qui prend en charge les rémunérations des entreprises défaillantes. Le transfert doit démarrer à compter du 1er juillet.
A l’aube d’une réforme de sa gouvernance avec un possible encadrement par le Parlement, le périmètre de l’Unédic sera alors limité à ses seules missions historiques, sans que l’on sache encore comment elles vont évoluer.
Ce projet de scission est l’aboutissement d’une profonde crise révélée entre 2018 et fin 2019 par la Cour des comptes et le cabinet E & Y . Leurs rapports ont mis en lumière de graves dysfonctionnements – avec dépôts de plaintes à la clé – au sein de la délégation Unédic AGS (DUA). En même temps qu’une reprise en main de la direction de cette entité, historiquement logée au sein de l’Unédic, le Medef a poussé pour une séparation pure et simple, afin de mieux clarifier les rôles.
Partition judiciaire potentiellement explosive
Après des mois de passes d’armes entre d’un côté le patronat et la CFDT, favorables à la scission, et les syndicats qui y sont opposés(FO et CGT), une date butoir pour le transfert des salariés de la DUA avait été arrêtée lors d’un conseil d’administration de l’Unédic en juin dernier. Un accord de méthode a suivi fin novembre encadrant, outre la négociation des modalités de ce transfert, celle des futures relations avec l’AGS – l’Unédic restera le banquier central de l’AGS, un peu comme l’Urssaf Caisse nationale, ex-Acoss, vis-à-vis des entités régionales.
En toile de fond de ces grandes manoeuvres se joue une partition judiciaire potentiellement explosive. Après enquête préliminaire, un juge a été désigné pour instruire les plaintes du Medef, de la CPME, de l’Unédic et de l’AGS . Il s’agit, selon nos informations, de Vincent Lemonier, en poste au tribunal de Paris. Ce qui se joue dans son bureau, c’est de faire la lumière sur les soupçons de malversation de l’ex-équipe dirigeante de la DUA.
Au-delà, il s’agit de vérifier les pratiques de certains mandataires judiciaires. Alors que la profession dans son ensemble souffre d’une mauvaise réputation, ces cabinets étaient soupçonnés, au moment du dépôt de la plainte fin 2019, d’abus de confiance aggravé, de faux et d’usage de faux et de recel d’abus de confiance aggravé. En créancier de rang un, la nouvelle direction de l’AGS et le Medef s’interrogeaient sur le faible taux de recouvrement des sommes qu’elle a avancées pour certains dossiers de redressement ou de liquidation.
Les sondages menés alors par le cabinet Advolis Orfis avaient fait ressortir pour 15 millions d’euros de préjudice. En clair, cet argent aurait servi à autre chose qu’à payer des salaires, par le biais d’honoraires gonflés par exemple, quand certains dossiers auraient été clôturés alors qu’il restait encore de l’argent dans les caisses. A l’époque président de l’AGS, Serge Petiot estimait qu’il ne s’agissait là que de la pointe émergée de l’iceberg .