Ce pourrait être une alternative aux coupures de courant programmées en cas de tension extrême sur le réseau, tant appréhendées par le gouvernement au cours de l’hiver dernier. Le ministère de la Transition énergétique a annoncé, vendredi 13 octobre, travailler sur un projet de décret pour expérimenter cet hiver une “limitation temporaire” de la consommation d’électricité de milliers de clients résidentiels. Ce test devrait avoir lieu entre la date de publication du décret – inconnue à ce jour — et le 31 mars 2024. Aucun recours ni indemnisation ne sont prévus à ce jour. Le texte sera présenté au Conseil supérieur de l’Energie le 26 octobre.
En quoi consiste cette expérimentation ?
Concrètement, elle aurait lieu en une seule fois, pour “quelques heures” et sur un périmètre d’environ 200 000 personnes équipées de compteurs Linky, qui seront prévenues à l’avance par voie postale. Le test grandeur nature reviendrait à abaisser leur puissance disponible à 3 kilovoltampères (kVA) – qui est généralement de 6 kVA dans les foyers. Cela “présenterait l’avantage de ne pas interrompre l’alimentation des clients et de préserver un niveau minimal d’alimentation pour les usages électriques de base (3 kVA, correspondant à un radiateur, un ordinateur portable en charge, un réfrigérateur)”, a détaillé Enedis. Les ménages concernés devront ainsi se contenter, durant une période maximale de 4 heures, du “seuil de puissance minimal permettant de faire fonctionner les équipements courants peu énergivores”.
Contacté par l’AFP, le réseau de distribution d’électricité aux particuliers Enedis a expliqué avoir été sollicité par les pouvoirs publics pour “travailler à une nouvelle mesure de sauvegarde pour envisager la sécurisation du réseau électrique à moyen/long terme”, en alternative aux coupures temporaires”, ces délestages tant redoutés l’hiver dernier et mis en place pour éviter un éventuel black-out. Le projet de décret prévoit que le test soit mené en hiver, au moment où le réseau est le plus sollicité en raison des besoins de chauffage. “Notre responsabilité, c’est de faire en sorte d’améliorer la résilience du système en expérimentant divers outils, pour tester leur efficacité”, a justifié le ministère.
Existe-t-il d’autres dispositifs ?
Depuis plusieurs mois, le gouvernement mène des campagnes pour inciter les ménages à souscrire à des abonnements électriques “à point mobile”, c’est-à-dire à des offres qui incitent à baisser sa consommation électrique, en augmentant ou abaissants les tarifs du KWh durant les pics et les creux de consommation. Jeudi 12 octobre, le ministère de la Transition énergétique a salué la popularité de l’offre “Tempo” d’EDF, qui a doublé sa clientèle en un an.
Des entreprises privées proposent aussi des solutions d’”effacement diffus”. Des boîtiers positionnés notamment le long des systèmes de chauffage dans les appartements et maisons permettent ainsi de couper le chauffage durant quelques minutes lorsque le réseau connaît un moment de forte demande. A grande échelle, ce petit dispositif peut permettre de soulager considérablement le réseau électrique.
Ces mesures seront-elles nécessaires cet hiver ?
Le ministère veut rassurer : ce projet d’expérimentation n’a “aucun lien avec la situation du système électrique pour cet hiver”, assure-t-il. “Nous abordons l’hiver dans de bien meilleures conditions que l’hiver dernier”, avec un “niveau de tension sur le système électrique actuellement moindre que l’année dernière à la même période”, grâce à une moindre consommation et à la remontée en puissance du parc nucléaire, a souligné le ministère. “La France est d’ailleurs exportatrice d’électricité depuis le début d’année 2023, à des niveaux proches de 2021”, alors qu’elle avait été importatrice nette sur la quasi-totalité de 2022, a-t-il encore relevé.
Pour autant, le gouvernement veut “déterminer” s’il est “techniquement possible de mettre en œuvre un nouvel outil pour sauvegarder le réseau électrique en cas de tension extrême, pour éviter des coupures programmées”. Des moyens existent déjà avant d’en arriver au scénario ultime des coupures : mobilisation des capacités de production, importations d’électricité, baisse de consommation volontaire des industriels, baisses de tension de 5 % sur les appareils électriques. Comme dans le cas des coupures, un tel mécanisme ne serait “activé que si tous les autres leviers étaient insuffisants pour éviter une coupure d’électricité généralisée”, a indiqué le ministère.