La simplification administrative n’est pas un long fleuve tranquille. Cahin-caha, le Registre national des entreprises conçu pour faciliter leurs démarches administratives se met en place. Mais son parcours demeure encore semé d’embûches.
Alors que ce guichet unique devait devenir au 1er janvier 2024 la porte d’entrée pour toutes les formalités (créations, cessations, modifications de personnes physiques ou de sociétés etc.), Bercy vient d’acter le maintien d’un filet de sécurité afin d’éviter les déconvenues.
2,3 millions dépôts de formalités
La nouvelle procédure de secours visera plus spécifiquement les formalités de « modification de personnes morales », à savoir les sociétés pour lesquelles seules 16 % des démarches passent actuellement par le guichet unique, souligne-t-on au ministère de l’Economie. Ce dispositif sera mis en oeuvre « au plus tard ce 31 décembre sous marque blanche mais gérée par Infogreffe », le portail géré par les greffes des tribunaux de commerce, précise-t-on.
Selon Bercy, le guichet unique serait nettement plus performant s’agissant des autres formalités : 80 % des cessations d’activité y seraient effectuées, et même l’intégralité des démarches de créations d’entreprises et de modification de personnes. Au total, 2,3 millions dépôts de formalités ont été réalisées sur le site cette année.
« Importants dysfonctionnements »
Au vu du rapport publié mercredi dernier par la Cour des comptes, il y avait urgence à se donner davantage de temps. Selon les magistrats, à l’automne 2023, la situation globale du guichet unique tendait certes à s’améliorer. Mais selon eux, ces progrès ne permettaient pas de mettre les entreprises à l’abri de « graves anomalies » et « d’importants dysfonctionnements ».
« Les actions mises en oeuvre par la Direction générale des entreprises en lien avec les autres acteurs ne paraissent pas de nature à résoudre l’ensemble des difficultés d’ici à la fin de l’année » est-il également écrit dans le rapport.
Gestion défaillante de bout en bout
Lancé le 1er janvier 2023, le guichet unique créé par la loi Pacte de 2019 devait être synonyme de simplification et de lisibilité pour les utilisateurs. Ce, en proposant un seul accès pour réaliser ses démarches, là où auparavant 7 centres de formalités des entreprises (CFE) intervenaient : l’Urssaf, les greffiers des tribunaux de commerce, les chambres consulaires (commerce et industrie, métiers, agriculture), les services des impôts.
Dans les faits, son parcours s’est révélé chaotique, contraignant déjà Bercy à activer des procédures de secours jusqu’en fin d’année. Pour la Cour des comptes, la gestion de ce chantier a de bout en bout été défaillante : défaut d’analyse préalable, « échéance initiale irréaliste compte tenu de l’ampleur du projet », « gouvernance et pilotage inadaptés au projet », « perspectives sans garantie d’une résolution rapide des difficultés », égrène-t-elle.
« Réforme insuffisamment préparée »
« Les conséquences d’une réforme insuffisamment préparée et mal conduite pourraient donc se faire encore sentir pendant plusieurs années sans avoir apporté aux entreprises la simplification attendue », alerte-t-il.
Pour les magistrats, la généralisation de la fonctionnalité « création d’entreprise », sur le seul guichet unique, a notamment entraîné « d’importants dysfonctionnements ». Au lieu de simplifier la vie des entreprises, cette situation les a « fortement pénalisées (… ) d’autant plus que le dispositif d’assistance aux utilisateurs s’est révélé insuffisant » pointent-ils.
« Cette réforme était nécessaire, maintient-on aujourd’hui à Bercy. Mais une bonne idée peut parfois être difficile à mettre en oeuvre. En 2024, tout sera fait pour améliorer l’ergonomie et la qualité de l’outil ».