Face à l’inflation, les géants de l’agroalimentaire veulent montrer patte blanche. Accusés par certains acteurs d’entretenir la flambée des prix en empochant de confortables marges au passage, les industriels se sont engagés dans des renégociations avec les distributeurs, et les premiers résultats de ces échanges devraient être visibles dans les prochaines semaines, a déclaré le patron de l’Association Nationale des Industries Alimentaires (Ania).
Interrogé sur FranceInfo , Jean-Philippe André a rappelé que sur les 45 géants de l’agroalimentaire, «80% vont activer des leviers pour faire en sorte que, dans les trois prochains mois, les prix en rayon baissent». Dans la majorité des cas, il ne s’agira toutefois pas d’un recul pérenne, mais plutôt de promotions temporaires : les industriels concernés doivent encore encaisser, en amont, des coûts élevés, les prix des matières premières n’ayant pas baissé, a argumenté le représentant. Les prix en rayon de certains produits, comme ceux à base de céréales, de volaille ou de café, pourront quant à eux bénéficier durablement de la chute des matières premières.
Les promotions auront «un vrai impact pour les consommateurs», a assuré le président de l’Ania, à partir de la première quinzaine de juillet et pour trois mois. Elles seront visibles sur 200 à 300 références nationales, et les baisses de prix engendrées devraient s’échelonner entre «7,5% et 10%», jusqu’en septembre, selon Jean-Philippe André. «Vous allez avoir quatre, cinq marques qui vont pouvoir baisser […] et toutes les autres vont faire des opérations promotionnelles qui n’étaient pas prévues», a-t-il expliqué. Les produits concernés seront variés, la totalité des 75 plus grandes entreprises de l’agroalimentaire devant proposer des opérations, selon le président du directoire de Haribo France. Ces actions devraient par ailleurs être financées par les industriels, qui prendront sur leurs marges.
Pas de retour aux prix d’avant
Le patron de l’Ania a toutefois rappelé qu’il ne croyait nullement à un retour aux prix d’avant-crise. «On ne reviendra jamais à ce niveau-là», tous les éléments – dont les salaires – ayant été «chamboulés», s’est-il justifié. «Il est juste et honnête de dire qu’on ne reviendra pas aux niveaux de 2019, ça, c’est certain», a-t-il martelé. Un constat similaire à celui dressé par l’Insee : selon les statisticiens nationaux, l’inflation devrait ralentir considérablement d’ici la fin de l’année, mais sans aller jusqu’à une déflation pour autant. «Les prix à la consommation des produits alimentaires pourraient nettement ralentir, sans toutefois forcément baisser en moyenne», résumaient-ils dans leur note.
Le patron de l’Ania s’est par ailleurs insurgé contre l’idée selon laquelle ses membres auraient bénéficié de marges particulièrement massives grâce à l’inflation. S’appuyant sur un rapport passé de l’inspection générale des finances (IGF) sur l’année 2022, il a contesté le taux de marge de 48% avancé par l’Insee. «Ça doit se compter sur les doigts de la main, une entreprise, sur les 75 [plus grands groupes agroalimentaires] qui nous dit aujourd’hui “j’ai conservé mon niveau de marge”», s’est-il agacé.
S’il n’y aura pas de retour aux prix des dernières années, les industriels promettent donc de prendre leur part dans la lutte contre l’inflation. Reste à voir si les distributeurs répercuteront ces baisses de prix et promotions dans les rayons. Sur Cnews, jeudi matin, la ministre déléguée chargée du Commerce a confirmé que les consommateurs devraient voir certaines «baisses» de prix dans les rayons, dès juillet, tout en avertissant les acteurs que l’État compte bien surveiller de près la situation. «Nous serons extrêmement vigilants pour que les baisses de prix soient répercutées», a prévenu Olivia Grégoire.