Si depuis 2008 la discrimination à l’embauche est interdite par la loi en France, elle reste malheureusement une réalité pour de nombreux candidats à l’emploi. Et les experts du ministère du Travail viennent une nouvelle fois le confirmer.
Pour se faire une idée plus précise, ils ont en effet recouru à la technique du « testing » . Concrètement, ils ont créé des profils de candidats fictifs pour répondre à des annonces bien réelles. Et les employeurs ont reçu des candidatures qui présentaient un profil et une expérience identiques. Mais qui, pour certaines, différaient par le nom ou le prénom à consonance maghrébine de ceux qui étaient censés être candidats.
Envoyer 1,5 fois plus de candidatures
Au total, 9.600 candidats fictifs ont répondu à pas moins de 2.400 offres d’emploi entre décembre 2019 et avril 2021. Chaque annonce a donc reçu quatre candidatures. Celles-ci, de qualité comparable, se distinguaient par le sexe et l’origine des candidats, suggérés par leurs noms et prénoms.
Premier constat, en moyenne et à qualité comparable, « les candidatures dont l’identité suggère une origine maghrébine ont 31,5 % de chances de moins d’être contactées par les recruteurs que celles portant un prénom et nom d’origine française ». De fait, à profil équivalent, une personne dont le nom ou le prénom a une consonance maghrébine « doit envoyer en moyenne 1,5 fois plus de candidatures […] pour recevoir le même nombre de réponses positives », détaille l’étude des services des statistiques et de la recherche du ministère du Travail (Dares).
Ces candidatures sont plus souvent que les autres soit rejetées soit directement ignorées. Une attitude des employeurs qui, a priori, semble la règle tant pour les candidats que les candidates.
Tous les secteurs touchés, pas tous les métiers
Deuxième constat, cette discrimination à l’embauche, même si elle est généralisée, varie selon les métiers et secteurs professionnels. Les différences de traitement des candidats supposés d’origine maghrébine par rapport aux autres sont ainsi « particulièrement importantes pour les employés commerciaux, les commis de cuisine et les employés administratifs » .
Par contre, elle est plus faible dans deux cas. D’une part, si les postes à pourvoir concernent les métiers qui connaissent de fortes tensions et difficultés de recrutement. D’autre part, tous secteurs confondus, si les postes concernent des profils qualifiés. « Toutes choses égales par ailleurs, les candidats d’origine supposée maghrébine sont relativement moins discriminés » lorsqu’il s’agit de recruter des cadres, explique ainsi la Dares. Que ces cadres soient ou non amenés à diriger une équipe.
Hommes et femmes également discriminés
Enfin, dernier constat de cette vaste étude, hommes et femmes sont logés à la même enseigne, quelle que soit la situation familiale. La différence de traitement des candidatures est jugée « non significative » statistiquement par la Dares. Ce qui tend à prouver que les deux discriminations classiques dénoncées sur le marché du travail (l’origine ethnique, d’une part, et le sexe, de l’autre) ne se cumulent pas.
Pour autant, la Dares reste prudente dans les enseignements que l’on peut tirer de son étude. Au-delà du constat, l’étude ne permet « ni de distinguer directement les mécanismes sous-jacents » à ces discriminations, ni « de conclure sur la façon d’y remédier ».