La réforme visant à supprimer l’avantage fiscal sur le gazole non routier (GNR) ne sera sans doute pas effective au 1er janvier prochain , contrairement à ce qui était prévu. Le ministère de l’Economie a annoncé son report sine die, mardi, en détaillant les mesures de soutien aux entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics. Cet ensemble de mesures figure dans le « plan de résilience » présenté la semaine dernière par le Premier ministre, Jean Castex, face aux retombées de la guerre en Ukraine.
« Le gouvernement prend acte de la demande des professionnels de reporter la réforme supprimant l’avantage fiscal sur le GNR, qui doit en principe entrer en vigueur au 1er janvier 2023 », peut-on lire dans le communiqué de Bercy. « Compte tenu de l’augmentation des prix, le gouvernement reconnaît que les conditions de mise en oeuvre de cette réforme ne sont plus réunies et qu’il appartiendra au Parlement d’établir un calendrier lors de la prochaine loi de Finances », poursuit le ministère. De fait, dans cette période électorale, les décisions sont désormais renvoyées à la future majorité. Mais la déclaration de l’exécutif actuel donne des gages aux professionnels.
Taux réduit pour le BTP
C’est la quatrième fois que cette mesure est ajournée. L’an passé, Bercy avait invoqué le « contexte de crise » sanitaire pour justifier ce qui devait n’être qu’un report à l’après-présidentielle. La fin du taux réduit dont bénéficie notamment le BTP sur le gazole non routier aurait dû générer 870 millions d’économies en année pleine. Concrètement, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour le GNR devait passer de 18,82 à 59,40 centimes d’euro par litre, en une seule fois.
Cette réforme envisagée depuis 2018 devait aussi témoigner de l’engagement du gouvernement d’Emmanuel Macron en faveur de la transition écologique. Mais elle s’est heurtée à une succession de crises, à commencer par celle des « gilets jaunes », qui a aussi contraint l’exécutif à geler la taxe carbone sur l’essence et le diesel, alors que la hausse de cette taxe comptait parmi les mesures phares du programme du candidat Macron en 2017.
« La fiscalité énergétique est celle qui concentre le plus d’enjeux d’acceptabilité politique », soulignait le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) , organe rattaché à la Cour des comptes, dans un rapport paru en février. Il mettait aussi en avant le caractère régressif des taxes liées à l’environnement, avec un taux effectif rapporté aux revenus qui s’avère plus lourd pour les ménages modestes.
Il n’en reste pas moins que la fiscalité énergétique, basée sur le prix du carbone, demeure le meilleur outil pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Pour le CPO, il faut donc trouver un moyen de la rendre acceptable, par exemple en fléchant les recettes fiscales vers des investissements verts et des aides.
Loi Climat et résilience
L’an dernier, tout en reculant sur l’outil fiscal, le gouvernement assurait ne pas renoncer à ses ambitions pour le climat. La mesure de suramortissement de 40 % pour les entreprises achetant du matériel utilisant des alternatives au gazole non routier avait notamment été maintenue. Le dispositif est valable pour tout achat ou location avec option d’achat effectués avant la fin 2022.
Par ailleurs, la loi Climat et résilience, promulguée en août 2021 , prévoit toujours la suppression de l’avantage fiscal sur le gazole du transport routier à l’horizon 2030. Mais aucune première étape n’est stipulée, et le contexte actuel de hausse des prix rend cette perspective très peu probable. Le président-candidat tente en tout cas de donner des gages sur son engagement : il promet de consacrer 10 milliards de plus par an à la transition écologique lors de son prochain mandat, s’il est réélu.