La croissance freine sévèrement, mais le chômage, lui, continue de diminuer, au grand dam des économistes qui y perdent leur latin. Le nombre de demandeurs d’emploi sans activité inscrits à Pôle emploi, rangés dans la catégorie A, a diminué de 3,6 % au quatrième trimestre en France hors Mayotte, pour concerner un peu moins de 3,05 millions de personnes en moyenne, selon des chiffres publiés par l’opérateur et le ministère du Travail le mercredi.
Il faut remonter à fin 2011 pour retrouver un tel étiage. Cela représente 114.000 personnes de moins par rapport au trimestre précédent. Ou encore 312.100 de moins sur un an (-9,3 %) pour les effectifs de cette catégorie, la plus scrutée, les moins de 25 ans en ayant un peu plus profité que les plus de 50 ans.
« Meilleure déclaration des heures d’activité réduite »
Dans le même temps, le nombre d’inscrits ayant travaillé moins de 78 heures chaque mois (catégorie B) a continué de fortement augmenter (+39.200, +5 %), de même que celui de la catégorie C, ceux qui ont déclaré plus de 78 heures (+34.400 soit +2,3 %). A noter que Pôle emploi a modifié par étapes la procédure d’actualisation des inscrits l’année dernière. De janvier à novembre, cela a eu pour effet selon l’opérateur « une meilleure déclaration des heures d’activité réduite » notamment, et donc d’un basculement de la catégorie A vers les catégories B ou C (-105.000 pour la première, +90.000 pour les deux secondes et +15.000 sorties de listes).
Au total sur les mois d’octobre à décembre, Pôle emploi a recensé 5,4 millions de personnes en cumulé sur ces trois catégories, soit 41.000 de moins (-0,8 % sur le trimestre, -5,1 % sur un an). Autre signal encourageant, le nombre d’inscrits depuis plus d’un an – 2,43 millions – a reculé de 13,4 %, toujours en France hors Mayotte. A 45,2 %, leur part dans le total continue de diminuer.
Le marché du travail résiste
Ces évolutions confirment la très bonne tenue des embauches l’année dernière telle qu’elle ressort des récentes statistiques de l’Urssaf, avec notamment plus de 5 millions de CDI signés. Même si les explications manquent pour comprendre les raisons d’une telle résilience, force est de constater que l’économie française continue à s’enrichir en emploi. Jusqu’à quand ?
Même si la prudence reste de mise, un coup de zoom dans les chiffres de Pôle emploi et le ministère du Travail laisse supposer que le ralentissement est en cours. Ainsi, les sorties de listes pour reprise d’emploi déclarée baissent depuis plusieurs trimestres et se situent en dessous de leurs niveaux moyens de 2019, avant le Covid.
En catégorie B, ce sont les petits contrats qui ont le vent en poupe. Pour autant, en catégorie C, les contrats de 151 heures ou plus, eux, continuent de progresser au point de profiter à un nombre record d’inscrits…
Dans sa dernière note de conjoncture, l’Insee table bien sur un atterrissage des recrutements avec une hausse anticipée du nombre de personnes en emploi de 50.000 « seulement » sur le premier semestre 2023, contre 236.000 sur la même période de l’année dernière.
A cet horizon, le taux de chômage, mesuré au sens du Bureau international du travail, le BIT, se maintiendrait autour de 7,3 % de la population active compte tenu aussi du ralentissement de cette dernière. Pour mémoire, l’objectif de plein-emploi que s’est fixé Emmanuel Macron d’ici à la fin du quinquennat représente une baisse de 2 points de pourcentage de ce taux environ.
Contraste selon les régions
A long terme, une étude publiée il y a un peu moins d’un an par le ministère du Travail et France Stratégie anticipait 760.000 postes à pouvoir en moyenne d’ici à 2030, sur la base des seuls départs en retraites et arrivées de jeunes sur le marché du travail. Une déclinaison régionale a été rendue publique mardi. Il en ressort que le dynamisme de l’emploi continuera de bénéficier aux zones côtières et du sud mais que, du coup, ces mêmes régions souffriront le plus de difficultés à pouvoir les postes.
A contrario, le quart Nord-Est de la France connaîtra moins de tensions de recrutements du fait d’un nombre de créations de postes moins élevé. Entre les deux, l’Ile-de-France occupera une position intermédiaire. Cette nouvelle étude prend aussi en compte les mobilités entre régions, mais pas – ce qui en constitue la limite – les flux de personnes qui sortiront du chômage ni les effets de la réforme des retraites voulue par le gouvernement sur le taux d’emploi des séniors.
L’évolution du chômage dépendra aussi des effets structurels (s’il y en a) du projet France travail de réorganisation de tous les acteurs du service public de l’emploi au sens large et qui sera présenté sous peu normalement.