Le manque de tonus de la croissance et la forte inflation n’ont pas eu raison de la résistance du marché de l’emploi. Au premier trimestre, le nombre de chômeurs au sens du Bureau international du travail (BIT) a légèrement diminué par rapport aux trois mois précédents (‑7.000), selon les chiffres publiés par l’Insee mercredi. Le nombre de personnes en recherche d’emploi est tombé à 2.186.000 au cours des trois premiers mois de l’année.
Le taux de chômage est resté stable à 7,1 % de la population active en France (hors Mayotte), mais après révision à la baisse de l’estimation pour le dernier trimestre 2022 ( 7,2 % initialement). Il retombe ainsi à un niveau jamais atteint depuis 1982, au début du premier septennat de François Mitterrand, hormis au deuxième trimestre de 2020, marqué par un recul en trompe-l’oeil lié au premier confinement. Surtout, il est « inférieur de 0,3 point à son niveau du premier trimestre 2022 et de 3,4 points à son pic de mi-2015 », souligne l’Insee.
Progression du taux d’emploi
Autre motif de satisfaction : sur les trois premiers mois de l’année, le taux d’emploi des 15-64 ans a de nouveau augmenté de 0,3 point pour s’établir à 68,6 %. Un niveau record depuis que l’Insee mesure cet indicateur, en 1975. Le taux d’activité des 15-64 ans s’est aussi redressé de 0,2 point au premier trimestre, à 73,9 %. Du jamais vu là aussi.
Difficile pour autant, malgré ces bons résultats, de prédire comment la situation de l’emploi va évoluer au cours des prochains mois. « La bonne performance du premier trimestre est surtout la conséquence de la croissance dynamique en 2021 et 2022 », écrivent les économistes d’ING dans une note publiée mercredi. « Les signes d’un refroidissement du marché du travail s’accumulent », alertent-ils cependant.
Comme eux, un certain nombre d’économistes attendent une remontée du taux de chômage sur la deuxième partie de l’année. « La dynamique des créations d’emploi est en train de ralentir. Aujourd’hui, l’économie française en crée juste pour stabiliser le taux de chômage. Mais les entreprises commencent à faire état de problèmes de demande plus que d’offre », relève Eric Heyer de l’OFCE.
Des prévisions contrastées
Dans les prochains mois, les effets du resserrement monétaire risquent, de plus, de peser de plus en plus sur l’activité économique. Alors que l’horizon s’assombrit, l’OFCE estime que la France n’échappera pas à une augmentation du chômage et attend un taux de 7,4 % en fin d’année, avec 46.000 destructions d’emplois au deuxième semestre, après 27.000 créations au premier. Dans ses prévisions, la Banque de France table elle aussi sur une remontée à 7,7 % au dernier trimestre 2023 puis à 8,3 % fin 2024.
Tout le monde ne partage pas cette vision. Au vu des chiffres publiés ce mercredi par l’Insee, le chef économiste de Swiss Life Asset Managers, Mark Brütsch, estime que le taux de chômage devrait se maintenir « autour de 7 % cette année ». « Face aux pénuries de main-d’oeuvre les entreprises vont réfléchir à deux fois avant de débaucher. Sauf peut-être dans le secteur de la construction, où le durcissement de la politique monétaire donne un coup de frein à l’activité », argumente-t-il.
De fait, les intentions d’embauche des entreprises (mesurées par Pôle emploi ou le Credoc) restent à un niveau très élevé. Le gouvernement table ainsi de son côté sur une poursuite des créations d’emplois tout au long de l’année 2023.