« Plus on tarde à intervenir sur une copropriété quand elle est dégradée, pire c’est à la sortie », a rappelé Patrice Vergriete à l’issue du Conseil des ministres. « C’est un peu comme avec les impayés de loyers, il faut réagir très, très vite », a-t-il ajouté.
Le ministre du Logement présentait le projet de loi « relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement », qui doit être examiné en janvier au Parlement. Un texte qui, selon lui, « vise à répondre à un enjeu majeur sur notre territoire, puisque 1 million de personnes aujourd’hui sont concernées par l’habitat indigne ».
Raccourcir les délais
Déjà, l’exécutif avait lancé fin 2018 son Plan initiatives copropriétés , juste après l’effondrement meurtrier de deux immeubles rue d’Aubagne, à Marseille. Ce plan a permis, selon lui, le traitement de 88.000 logements en France, avec 960 millions d’euros engagés. Mais les délais de mise en oeuvre de ces opérations – cinq, dix, voire vingt ans – restent bien trop longs, a estimé Patrice Vergriete.
Concrètement, pour permettre à une collectivité d’agir « en amont de la dégradation définitive » d’un immeuble, le projet de loi clarifie les possibilités de recourir à une opération de restauration immobilière. Opération qui impose aux copropriétaires de réaliser des travaux de réhabilitation dans un temps imparti.
Cette procédure coercitive s’appliquerait en cas de problème de salubrité, d’intégrité de l’immeuble ou lorsque la sécurité des habitants est en jeu. Alors qu’aujourd’hui la loi ne fait référence qu’à la notion assez vague « d’habitabilité ». Il s’agit d’éviter de se retrouver dans des situations où la destruction d’un bâtiment devient irrémédiable.
Prêt collectif
Toujours dans cette idée, le texte – qui s’appuie largement sur les propositions des maires de Mulhouse et Saint-Denis , Michèle Lutz et Mathieu Hanotin – crée une procédure d’expropriation des propriétaires de logements frappés par un arrêté de mise en sécurité ou d’insalubrité, et qui n’ont pas réalisé les travaux demandés. Alors qu’aujourd’hui, l’expropriation n’est possible qu’en cas de « péril irrémédiable ».
Le projet de loi crée aussi un prêt collectif pour financer les « travaux essentiels et de rénovation énergétique » des copropriétés, « plus souple dans sa souscription » et donc plus rapide à obtenir. Il pourra concerner aussi bien « les copropriétés aidées par la puissance publique » que les autres.
Le texte prévoit encore « l’insaisissabilité des comptes bancaires des copropriétés en redressement », ceci afin d’éviter la saisie d’aides publiques par les créanciers. Il permet l’ouverture d’une procédure de mandat ad hoc – destinée à prévenir les difficultés – en cas d’absence de syndic et d’absence de validation des comptes de la copropriété depuis au moins deux ans. Le dispositif de préemption par les collectivités est également rendu plus aisé.
Scission des très grandes copropriétés
Il s’agit encore de faciliter la scission de très grands ensembles « rencontrant des difficultés de gestion » en raison de leur taille. Et d’y accélérer ainsi les prises de décision. L’objectif est d’éviter les situations inextricables, comme celle qu’a connue l’ensemble de Grigny 2 avec ses 2.000 copropriétaires – dégradé, surendetté et investi par les marchands de sommeil.
Alors que le gouvernement cherche une réponse à la crise du logement, le texte embarque aussi des mesures destinées à accélérer la construction de logements dans le cadre d’opérations d’intérêt national. Il permet notamment une participation du public « par voie électronique » dans la phase de concertation. Ou « une prise de possession anticipée des biens en matière d’expropriation ».
Patrice Vergriete avait déjà indiqué vouloir s’appuyer sur ce qui a été fait en Ile-de-France pour les Jeux Olympiques de 2024 pour développer à rythme rapide des logements dans des territoires en tension ou en réindustrialisation. Ces dispositions vont dans ce sens.